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peuvent que se féliciter d’y voir arriver M. Pérès Caballero dont le rôle a été si important à la conférence. Sa compétence est connue, son caractère inspire toute confiance. Dans les circonstances où se trouve l’Espagne, il était difficile d’y constituer un ministère plus capable de remplir sa double tâche, au dedans et au dehors.


Le voyage de l’empereur Nicolas en Italie a excité l’attention dans le monde entier. Il a suscité beaucoup de commentaires. Tout le monde s’accorde à en reconnaître l’importance.

En un sens, rien n’est plus simple que ce voyage. Le roi d’Italie, après son avènement, avait fait à l’empereur de Russie une visite que celui-ci devait lui rendre un jour ou l’autre ; mais ce n’est pas sans intention qu’il a choisi aujourd’hui pour cela. Une fois déjà il avait été question de ce voyage ; on avait même cru qu’il allait se faire ; puis il avait été ajourné sine die, ce qui n’avait pas été sans causer quelque déception en Italie. Mieux vaut cependant qu’il ait été renvoyé au moment présent. Autrefois, l’opinion était partagée en Italie ; elle n’y était pas, tant s’en faut, favorable à un rapprochement avec la Russie, contre laquelle les partis avancés manifestaient les plus mauvaises dispositions. C’est peut-être ce qui alors a arrêté l’Empereur. Mais les temps sont changés : aujourd’hui les socialistes eux-mêmes ont déclaré dans leurs journaux qu’ils n’avaient aucune manifestation à faire contre l’hôte de leur pays. Cela vient de causes diverses, dont les unes sont déjà lointaines et les autres toutes prochaines. Les premières sont que l’Italie s’est rapprochée de la France, qui est alliée de la Russie, et que l’Angleterre, qui est amie de l’Italie, s’est la première rapprochée de la Russie dont de vieux malentendus l’avaient longtemps séparée, au point de pratiquer avec elle une autre entente cordiale. Ce sont là les causes les plus sérieuses sans doute et les plus durables qui ont ramené les sympathies italiennes à l’empereur Nicolas, à son gouvernement et à son peuple. Il y en a d’autres qui tiennent à des circonstances récentes. Nous avons dit plusieurs fois que les sentimens de l’Italie étaient médiocrement d’accord avec l’alliance qui la lie à l’Autriche. On peut être alliés sans s’aimer : la raison a des raisons que le cœur ne connaît pas. Mais si l’alliance politique est la règle permanente d’un gouvernement, il y a des jours où le sentiment reprend ses droits chez un peuple impressionnable. Les souvenirs de campagnes diplomatiques qui datent seulement de quelques mois ont accentué une situation dont l’empereur Nicolas n’a d’ailleurs rien fait pour dissimuler le caractère. Tout le