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pris part ; mais celle-là, au moins, était dirigée contre le gouvernement, et non contre les armateurs. Il est vrai que ces derniers, comme toujours, en ont payé les frais.

M. Jules Siegfried, député du Havre, assimilant les inscrits à des pensionnés militaires, — et il en avait le droit puisque la loi du 18 avril 1831 est intitulée : « Loi sur les pensions de l’Armée de mer, » et que l’article 17 de la loi de finances du 26 février 1887 établit que les pensions dites de demi-solde sont assimilables aux pensions de l’armée de mer, — avait déposé une proposition de loi par laquelle le minimum de la pension entière pour les inscrits de la dernière catégorie serait porté à 600 francs et le maximum à 750 francs, et ceux de la première catégorie seraient respectivement de 1 800 et de 1 600 francs. Le gouvernement, qui participe annuellement à la Caisse des Invalides par une forte subvention, et qui était peu désireux de l’augmenter dans d’aussi fortes proportions, poussa les hauts cris, et, le 23 mai 1907, M. Thomson, alors ministre de la Marine et M. Caillaux, ministre des Finances, déposèrent un projet de loi réduisant de 600 à 360 francs le minimum de la pension de demi-solde.

Ce fut la raison de la grève… Les inscrits, états-majors en tête, voulaient les chiffres de M. Siegfried et protestaient contre ceux du gouvernement. La Chambre adopta cependant le projet de ce dernier, et ce projet, après avoir subi quelques remaniemens, fut voté par le Sénat dans la séance du 16 juin 1908. La Chambre l’a adopté définitivement le 26 juin.

En 1906, la cotisation globale des inscrits, c’est-à-dire 3 pour 100 de leurs salaires, s’élevait à 1 870 000 francs. Les pensionnés, au nombre de 49 000 (30 000 marins et 19 000 veuves) recevaient annuellement de la caisse 17 millions de francs, en chiffres ronds, provenant de la cotisation ci-dessus de 1 870 000 francs et de la rente du portefeuille de la caisse (3 500 000 francs). Le reste était fourni par le Trésor, obligé de verser annuellement à la Caisse une subvention variant de 11 à 13 millions, « versement qui ira toujours croissant au fur et à mesure que croîtra le taux des pensions. » En 1791, le taux des pensions était de 96 francs ; en 1862, de 135 francs ; la loi du 11 avril 1881 l’a porté à 204 francs ; enfin la loi de 1908 la élevé à 360 : soit une augmentation de 78 pour 100 qui entraînera une charge supplémentaire de 7 millions pour le budget et