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d’un homme. Mais je suis si intimement convaincu à présent de la chute de tout ceci, que je suis devenu d’un calme plat sur ce qui me touche. Ils ne peuvent plus me nier mes prédictions. Mes idées ont raison : cela suffit. Peu importe que ma personne ait tort.

« Je me fais une grande joie de vous revoir et pour longtemps. »


Lonné, ce 8 septembre [1817]. — « J’arrive avec un bon ouvrage, et un des plus désagréables et des plus effrayans qu’on puisse faire pour mes lâches persécuteurs. Il est court et peut être imprimé dans vingt-quatre heures. Je pense que le seul parti honorable pour moi est de suivre franchement ma ligne. J’ai assez jusqu’ici capitulé, attendu, écouté. A présent, il est trop tard, et il faut accepter ma position avec tous ses inconvéniens et ses avantages. J’ai grand besoin et grand désir de vous voir.

« Mille tendresses à Mouche. La pauvre créature ! »


Dimanche, 12 septembre [1817]. — «… Quant à mes dispositions, elles sont toujours fondées sur la raison, quoique je sois résolu de faire ce que vous voudrez. Mais soyez sûre que, si vous êtes pour le silence et la faiblesse, je n’y gagnerai rien de la part de gens sans foi. Tout ce qu’ils veulent (si toutefois ils veulent quelque chose et mettent de l’importance à rien), c’est que je me taise sans rien faire pour changer ma position. Ils vous tiendront le bec dans l’eau, toujours parlant de conciliations, de nécessité de s’entendre ; la session s’écoulera, j’aurai perdu le moment de l’attaque, et ils riront de vous et de moi. Je suis intimement convaincu que je suis noyé pour toute la vie du Roi, et peut-être après. J’ai un autre rôle : celui de chef d’une opposition honorable : je le perdrai aussi, si je ne me montre pas. Au reste, je suis si persuadé que toute cette machine dégringole, que tous les calculs sont vains.

« Soyez donc tranquille ; je serai aussi faible, aussi muet que vous le jugerez à propos. Au fond, mon indifférence pour eux est grande ; et comme dans tous les cas je me regarde comme perdu, mieux vaut l’être de la façon qui plaira à mes amis. »


Paris, le 29 juillet 1820. — « Comment avez-vous supporté le voyage ? Je voudrais bien recevoir une lettre de vous. Ne vous découragez pas si d’abord les eaux ne vous font pas de