Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 53.djvu/811

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

remède, de quelle bonne et florissante santé vous jouiriez pour le reste de vos jours ! »


Dimanche. — « Voilà, chère sœur, la notice de mes livres : un auteur qui vend ses livres est comme un marchand qui vend son fonds de boutique : tout cela est pour la plus grande gloire du Roi très chrétien ! Je n’ai point été vous voir aujourd’hui pour vous laisser reposer de votre voyage au Salon. »


[Avril 1817.] — « La bibliothèque est vendue. Je ne puis aller déjeuner parce que j’attends l’argent. J’ai aussi la permission de mettre la Vallée en loterie : ainsi me voilà bien dépouillé. Comme Job, je suis venu au monde nu, et je m’en irai nu… »


[4 juillet 1817.] — « Votre lettre, chère sœur, m’a fait grand’peine et grand plaisir. Si vous êtes seule, je suis seul bien plus que vous : mais je me soumets, parce que je suis las de lutter contre une destinée qui m’entraîne. Passons cela…

« En tout, je suis découragé de l’avenir, et quand je suis arrivé au bout de la journée, j’en ai assez…

« Voilà ma grande écriture qui, comme vous le voyez, est devenue petite. Puisse-t-elle vous réjouir autant que la vôtre m’a fait de bien !

« A vous, tout à vous. Mille tendresses à Mme de Staël… »


Ce mercredi 9 juillet 1817. — « Vous ne me ferez pas reprendre à l’espérance. C’est fait avec cette dame. Nous ne nous reverrons plus. Quant aux triomphes de vos ministériels, peu m’importe : je ne les verrai pas, et je n’y pense plus. Je ne travaille point, j’ai autre chose à faire. Je garde la malade. Sa santé entre dans mes plans : car encore faut-il qu’elle puisse être dans le cas de suivre la résolution quelconque que je pourrai prendre.

« On me mande de Paris que le beau plan de me favoriser d’une justice au mois de novembre subsiste toujours. Cette idée seule me fait bouillonner le sang… Soignez votre santé ; pensez aux beaux épis, bâtissez votre chaumière [Andilly] et gardez-la plus longtemps que je n’ai gardé la mienne.

« Nous verrons sans doute évêques les aumôniers de Buonaparte et les chapelains du cardinal Fesch ; c’est dans l’ordre. Mais les vieux confesseurs et martyrs de l’exil du Roi, les prêtres