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Et l’artiste en extase évoque des féeries
Au fond des bois où dort sur les mousses fleuries
Un rayon de lune argenté,
Et pendant que le chant éperdument s’élève,
Tout à l’œuvre qu’il crée, avec délice il rêve
De gloire et d’immortalité !

O Rossignol divin, voix de la Nuit muette
Qu’on entendra toujours, bienheureux le poète
Qui, comme toi, petit oiseau,
Puise d’un cœur ému ses chants dans la nature
Et peut, sans la troubler, charmer une âme pure
En y versant l’amour du Beau.


LA SOURCE


Cachée au fond des bois, loin des pas indiscrets,
Elle chante, ignorée, et son murmure frais
Seul au silence la révèle ;
Des fleurs et de la mousse entourent son flot pur,
Et limpide, elle brille ainsi qu’un œil d’azur
Dès que vient la saison nouvelle.

Lorsqu’un soleil de feu courbe les épis lourds
Et que, dans l’air brûlant, vibrent les alentours,
Les oiseaux du Ciel y vont boire ;
Son eau vivifiante est suave ; on croirait
Qu’elle a pris tes vertus secrètes, ô forêt,
Quand Mai rayonne dans sa gloire.

Son tranquille miroir, par les matins d’été,
N’a jamais réfléchi dans sa limpidité
Que cette vision exquise :
La grâce et les traits purs d’une enfant de dix ans
Lorsque, pour y puiser, de chez les paysans
Y vient la petite Denise…