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nombreux ouvrages et mémoires spéciaux. Mais j’ai lu, comme beaucoup d’autres, un livre de lui dont l’accès est moins difficile et dont la réputation est mondiale : La méthode historique. Si des esprits timorés craignent de perdre, avec la foi, l’indépendance de leur pensée, qu’ils méditent cette vigoureuse démonstration de la thèse contraire : ils verront tomber toutes les objections accumulées par la critique rationaliste contre une apologétique trop naïve ou trop imprudente, mais rendues vaines contre une exégèse plus circonspecte et plus pénétrante, dans son accord fondamental avec l’enseignement de l’Eglise.

Je n’ai pas seulement lu, j’ai eu l’occasion d’entendre le Père Lagrange. Pendant le semestre d’hiver, des conférences de vulgarisation ont lieu, plusieurs fois par semaine, dans la grande salle de l’Ecole. J’ai pu constater qu’elles attiraient une nombreuse assistance. Ce jour-là, le conférencier nous entretint des récentes fouilles de Crète. Il le fit, non en pédant qui disserte d’après des livres, mais en voyageur qui raconte bonnement ce qui est tombé sous ses yeux et ce qui l’a frappé. Des photographies, qu’il faisait circuler dans l’auditoire, précisaient le sens de certaines explications un peu techniques. C’était un charme de l’écouter. Mon attention allait constamment de sa chaire aux figures des auditeurs, et j’étais surpris vraiment qu’à Jérusalem on pût réunir un public aussi complaisant, autour d’un religieux dominicain qui décrit le palais du roi Minos ou les toilettes et les bijoux de Pasiphaé, fille du Soleil. Il y avait là des Musulmans et des Israélites, — professeurs ou fonctionnaires, — des congréganistes appartenant aux autres ordres, des médecins étrangers, des directeurs d’écoles protestantes, le receveur de la Poste française, le fondé de pouvoirs du Crédit lyonnais, et enfin le personnel et les dames des consulats, qui, à Jérusalem, représentent le monde sélect des ambassades. Les conditions, les religions et les races les plus diverses se rencontraient ainsi, momentanément réconciliées, au pied de cette chaire, où un prêtre catholique leur exposait les dernières découvertes de la science moderne.


IV

A quelque confession qu’elles appartiennent, il est incontestable que toutes ces écoles contribuent à maintenir, en Orient,