Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 52.djvu/726

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à la rentrée ; l’Assemblée l’avait décidée avant la chute de M. Clemenceau, et un peu contre lui ; M. Briand a déclaré qu’il serait fidèle j à ce rendez-vous. Toutefois le mot d’ « aventure, » qui avait déjà été prononcé par M. Clemenceau, a été repris par lui, et M. Charles Benoist n’a aucune illusion à se faire, — aussi ne s’en fait-il certainement aucune, — sur le peu de concours qu’il trouvera auprès du gouvernement. Heureusement, il n’est pas homme à se décourager pour si peu. Avant de s’adresser à la Chambre, il s’est adressé au pays. Qu’il continue. Les Chambres trouvent généralement très bon le système électoral dont elles sont sorties, et c’est seulement par une forte pression venue du dehors qu’on obtient qu’elles le changent. Les vacances de la Chambre n’en seront probablement pas pour M. Charles Benoist.

Elles n’en seront pas non plus pour le ministère qui aura à préparer la session prochaine. C’est alors qu’on le verra à l’œuvre. On savait déjà que M. Briand était un orateur habile et il n’a pas démenti, sous ce rapport, l’opinion qu’on avait de lui. Mais est-il, autrement qu’en paroles, un homme de gouvernement ? Échappera-t-il à l’illusion, que se font souvent les orateurs, de croire qu’ils ont rempli toute leur fonction quand ils ont fait un discours ? Etendra-t-il ses vues et son action au-delà du Palais-Bourbon ? S’il le fait, nous dirons de lui une fois de plus qu’il est très différent de son prédécesseur, car M. Clemenceau a laissé le pays en proie à la décomposition morale, à l’anarchie administrative, à la corruption politique dont M. Combes avait ouvert chez nous cette ère que M. Millerand a un jour qualifiée d’« abjecte. » A ce point de vue, rien n’a été fait, tout est à faire, et nous nous demandons ce que fera M. Briand.


Francis Charmes.
Le Directeur-Gérant,
Francis Charmes.