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les Indous absorbent par larges tranches et qu’ils digèrent fort mal, accroissent l’antagonisme des deux races, au lieu de rapprocher les deux camps.

Passons aux écoles indigènes que fréquentent quatre millions d’enfans. Certains maîtres, imbus d’idées très avancées, y enseignent une morale particulière. En décembre 1908, on a saisi des bombes chez l’un d’eux, à Chittagong. Ces pédagogues, peu surveillés, contribuent à entretenir l’effervescence et préparent des générations de révoltés, en pétrissant d’idées révolutionnaires l’argile molle des jeunes cerveaux. Ils sèment en bon terrain. Déjà indisciplinés par nature, ces adolescens considèrent la rébellion comme héroïque, qu’elle s’appelle désobéissance aux lois, mépris des institutions, ou résistance au pouvoir établi. Tout révolté leur est sympathique. Ces jeunes frondeurs, les yeux remplis d’éclairs, dévorent les hauts faits des rebelles, qu’ils soient anglais, américains, japonais, persans ou russes. Ils font des vœux pour le triomphe définitif des émeutiers persans ; les attentats terroristes, qui ensanglantent les villes russes, les comblent d’aise. En fouillant dans le passé, les péripéties de l’indépendance américaine les émerveillent. Ils ne rêvent que bandes armées, coups de revolver, embuscades, poursuites échevelées, luttes sauvages, et, finalement, évacuation de l’occupant, qui, en l’espèce, est Anglais.

Quelques-uns des étudians qui suivent, à l’étranger, des cours de droit et de médecine, prennent aussi des leçons « d’action directe. » À Whitechapel, à Patterson, à Paris, ils étudient, les high explosives, leur mode de conservation et d’amorçage, la façon d’obtenir un effet maximum. Tilak répète à ces jeunes propagandistes : « Un tout petit matériel suffit pour préparer les quelques bombes nécessaires à une poignée d’hommes déterminés. »

Il vint un jour où l’anarchie, jugeant superflu d’aller chercher des enseignemens au loin, ouvrit à Calcutta même une école. Des « professeurs » experts inculquaient aux agens les principes indispensables. Une autorité occulte avait délimité des champs d’action où ces émissaires répandaient la doctrine. Bien entendu, la police a dispersé l’école ; mais a-t-elle extirpé le germe ?

Les Babous appuient leurs revendications sur les événemens intérieurs de la Russie, et, chose à peine croyable, ils trouvent des encouragemens chez quelques Anglais eux-mêmes. Comme