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REVUES ÉTRANGÈRES

À PROPOS DU CENTENAIRE DE LA MORT DE JOSEPH HAYDN


C’est le 31 mai 1809 qu’est mort, dans sa petite maison du faubourg viennois de Gumpendorf, le compositeur Joseph Haydn ; et il va sans dire que toute l’Allemagne, suivant son habitude, est en train de fêter solennellement ce funèbre centenaire, qui pourtant aurait paru fait plutôt pour attrister les amis et admirateurs du vénérable père de notre musique instrumentale. Mais, en vérité, toute occasion doit nous être bienvenue qui a chance de ramener un peu l’attention du public sur la personne et l’œuvre de l’un des plus glorieux, à la fois, et des plus méconnus entre les musiciens ; de ce grand Joseph Haydn que les maîtresses de piano elles-mêmes, aujourd’hui, s’accordent à dédaigner comme un « amuseur, » simplement parce qu’il a tâché et réussi à n’être jamais ennuyeux. Quelques années avant sa mort, le 22 septembre 1802, il écrivait à un amateur allemand, qui venait de faire exécuter chez lui son oratorio de la Création :


Bien souvent, au cours de ma vie passée, lorsque j’avais à lutter contre des obstacles de toute sorte qui me gênaient dans mon travail, lorsque je sentais faiblir les forces de mon corps et de mon esprit, et qu’il me devenait plus difficile qu’à l’ordinaire de persévérer dans la voie où je m’étais engagé, voilà qu’une pensée murmurait doucement à mon cœur : « Il y a, ici-bas, si peu d’hommes vraiment heureux et contens ! De toutes parts, sévissent le souci et la peine ! Qui sait si ton travail ne sera pas une source où un homme chargé sous le poids de l’occupation ou de la souffrance pourra puiser ne serait-ce qu’un instant de repos et de réconfort ? » Et toujours cette pensée a été pour moi un mobile très puissant, qui m’a