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que l’enfant lui-même, entraîné une fois à mal faire, montre la volonté de se bien conduire. Et ce n’est point encore assez. Il faut imposer à l’enfant, comme à la famille, une aide, rien qui ressemble à une inquisition pesant sur elle ou sur lui, mais une surveillance pleine de sollicitude, assez lointaine pour ne pas gêner leur existence, assez proche pour qu’aucun écart ne puisse lui échapper. Le rôle des probation officers est d’exercer cette surveillance sous la haute direction du juge. L’enfant, après examen attentif de sa personne morale, après enquête sur sa famille, est remis en liberté. Mais désormais un probation officer lui est attaché. Il le sait : il sait qu’il aura à rendre compte de ses actes, de son travail à l’école ou à l’atelier, de sa conduite à la maison. Il s’aperçoit vite qu’il a dans son surveillant, non pas un espion, mais un guide et un ami, qui fait de son relèvement leur œuvre commune, et qui s’y intéresse, s’y passionne, désolé de toute défaillance, enchanté de tout progrès. Ainsi soutenu, il a moins de peine à suivre le droit chemin. Il sait d’ailleurs aussi qu’il va de la sorte soit à la pleine liberté, s’il persévère, soit à l’internement du patronage ou de la maison de correction, s’il retombe dans ses erreurs premières. Le juge, par les rapports du probation officer, est tenu au courant de cette marche vers le bien. Il règle la surveillance : il la fait plus stricte ou plus lâche ; quand l’épreuve tourne mal, il supprime la liberté ; quand elle réussit, il n’a pas besoin de supprimer la surveillance ; et l’enfant, de lui-même, vient raconter à son probation officer, qui n’est plus que son ami, ce qu’il fait, ce qu’il veut faire, son existence et ses projets.

Une institution nouvelle ne vaut vraiment que par l’expérience et par les résultats. Ces résultats, quant aux enfans coupables, on les connaîtra par le nombre de ceux qui, après une première comparution devant le Tribunal spécial, après l’essai des mesures nouvelles, commettront un second délit : par le nombre des récidivistes. Si l’institution est bonne, ce nombre doit diminuer. A-t-il diminué ? Voici les chiffres. A Chicago, en 1905, sur 2 071 enfans abandonnés ou coupables, qui ont été mis en liberté surveillée, les récidivistes ont été un peu plus de cent. A New-York, en trois ans, sur 3 377 enfans, il y a 574 récidivistes ; à Denver, en quatre années, sur 1180 enfans, 40 récidivistes ; à Indianapolis, en 1904, sur 250, 6 ; à Philadelphie, en 1901, sur 1008, 27… La démonstration est éclatante, elle l’est encore davantage si