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Oh, monsieur, il ne m’écoute jamais : je n’en veux plus !…

— Maître Rollet ? interroge encore le président. Vous ne le réclamez pas ?

Me Rollet, directeur du Patronage de l’enfance, consulte son lieutenant, Me Marcel Kleine :


— Monsieur le président, le Tribunal va sans doute envoyer cet enfant en correction : je verrai si je peux le prendre.

Le Tribunal, en effet, acquitte Pierre L… « comme ayant agi sans discernement, » et l’envoie en correction jusqu’à sa vingt-et-unième année.

— Qu’avez-vous dit, que vous alliez le prendre ? demande, à mi-voix, la mère, à Me Rollet.

Me Rollet lui explique qu’il va étudier le dossier et l’enfant. Si l’un et l’autre lui paraissent trop mauvais, il laissera Pierre partir pour la colonie pénitentiaire. S’il aperçoit au contraire des chances de relèvement, il se fera remettre l’enfant par l’administration, et il le gardera au régime plus doux du patronage, mais avec la menace de lui faire réintégrer, à la moindre faute, la maison de correction.

— Ah ! bien, dit la mère ; mais vous aurez du mal !…

Les gardes ont amené une jeune fille, Germaine R… Elle n’a pas seize ans, et elle est extrêmement jolie. Elle n’ignorait pas qu’elle était jolie, on ne le lui laissa pas ignorer, et ses mœurs furent des plus légères. Cependant, elle manifeste beaucoup de regrets : le Patronage des Libérées offre de la recueillir ; le Tribunal l’acquitte et la confie à ce patronage.

Jacques L… et Henri D… ont volé aux Halles des branches de mimosa. Ils les revendaient deux sous chacune, sur le boulevard Sébastopol ; ils allaient aussitôt porter leur recette, dans un débit de la rue Quincampoix, à deux hommes qui les employaient à ce métier, et tous ensemble buvaient de l’absinthe. Ils ont à peine quinze ans ; ce sont de petits dégénérés, faces blêmes et scrofuleuses, corps étiques. Ils font une mine assez pitoyable. Le Tribunal les acquitte, et les confie à l’Assistance publique.

Georges G…, âgé de quinze ans, employé chez un commerçant, a volé dans un tiroir la monnaie d’un billet de 1 000 francs qu’il était allé changer. Puis il est parti pour Nancy, où il a dépensé une partie de cet argent. C’est un garçon à l’air doux et timide ; il a été entraîné par un camarade plus âgé que lui. Il pleure, et sa mère le réclame : il est acquitté et rendu à sa mère.