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Ces efforts, qui après tout grossissent la fortune publique, ne pouvaient laisser les socialistes indifférens. Leurs orateurs se sont donc mis en campagne aussitôt que la chose a été possible pour semer la mauvaise semence entre employeurs et employés, provoquer des grèves et des bagarres ; avec une âpre obstination, ils ont cherché à paralyser une industrie apportant du bien-être au milieu de populations pauvres, en quête de travail. Heureusement que jusqu’à présent leurs tentatives ont été vaines, car certainement la région d’Iglesias est la partie la plus prospère de l’île.

Au Sud de la Sardaigne, faisant face à une vaste baie, s’élève en amphithéâtre la ville de Cagliari, la Carales des anciens. Ses maisons roses, jaunes, bleues, s’étalent le long de la mer, ou s’étagent sur une colline abrupte, enserrées et couronnées d’anciennes fortifications et de vieilles tours pisanes. Du sommet de l’une d’elles, la vue embrasse un splendide panorama. Vers le Midi, c’est la mer, limitée à l’Ouest par des montagnes qui, au coucher du soleil, se profilent toutes mauves dans un ciel en feu. Plus près, voici le Stagno di Cagliari, grande lagune poissonneuse, dont les barques ont des formes exactement semblables à certaines lampes votives de bronze, probablement carthaginoises, actuellement dans les vitrines du musée des antiquités. A l’Est, une autre lagune, couverte de flamans roses, s’étend au milieu de campagnes vertes de blés pendant le printemps, semées de nombreux villages, coupées de bouquets de dattiers. Et, au pied de la tour, repose la ville elle-même, dont les rues étroites et tortueuses sont pleines de vie, de gaîté, et d’animation.

Un aimable habitant de Cagliari me faisait remarquer qu’elle n’était pas l’endroit rêvé pour les gens âgés. Il faut en effet toujours monter ou descendre ; mais c’est justement cette situation spéciale qui lui donne son principal attrait, car les villes bâties en terrain plat, manquant par conséquent de perspectives aériennes, sont presque toujours ennuyeuses et monotones à regarder.

Dès les temps préhistoriques, les hommes s’étaient installés un peu à l’Est de la Cagliari moderne. On a récemment retrouvé une importante station datant de cette époque. Les Phéniciens y fondèrent un comptoir ; la baie offrait à leurs vaisseaux un abri