Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 51.djvu/675

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

défalquons les habitans de cinq villes : Cagliari, 48 000 ; Sassari, 35000 ; Iglesias, 40000 ; Carlo forte, 7 500 ; Oristano 7 000 ; au total 107 000, il ne reste plus que 685 000 ruraux à répartir sur l’ensemble des campagnes.

L’émigration, elle aussi, va devenir un nouvel obstacle à la mise en valeur de l’île. Depuis une dizaine d’années, de 1 500 à 2 000 Sardes allaient dans nos possessions africaines, vers octobre ou novembre, afin d’y travailler, soit aux mines, soit dans les environs de Tunis, Bizerte, Bône et Philippeville, comme tâcherons, mais ils revenaient en mai et juin de l’année suivante ; de cinq à six pour 100 seulement s’établissaient dans le pays. Le gouvernement italien, voulant enrayer ce départ annuel, a tellement compliqué les formalités, qu’il a diminué dans de notables proportions ; mais il a été remplacé par l’immigration bien plus tentante dans le Nouveau Monde, ce qui est une nouveauté pour la Sardaigne. Depuis deux ans, 2 ou 3 000 hommes vont dans l’Amérique du Nord ou du Sud, et sur ce chiffre, 7 à 800 se rendent à Panama. Certains villages subissent une véritable crise de départs. D’Orani, l’année dernière, il est parti près de 400 personnes. De Fonni, une centaine ; de Ierzu, 300. Sans doute, pendant un certain laps de temps, il y aura une accalmie à cause de la crise économique aux Etats-Unis, mais une fois qu’elle sera terminée, l’exode pour la recherche du travail à longue distance va reprendre de plus belle, et la Sardaigne sera de plus en plus privée des bras nécessaires à son développement.

On rencontre dans toute la Sardaigne — c’est une des grandes curiosités du pays, — des monumens absolument spéciaux à cette île, puisqu’en Corse même ils sont inconnus. Ces monumens s’appellent des « nuraghes. » Ce sont des tours coniques, de dimensions variables ; certaines d’entre elles pouvaient s’élever à 10, 15 et 20 mètres au-dessus du sol. Malheureusement, et je parle des mieux conservées, aucune n’est complète, c’est-à-dire que le sommet manque à toutes. Aristote (IVe siècle avant Jésus-Christ) mentionne déjà comme des bizarreries ces singuliers édifices, à coupole, ajoute-t-il. Il faut donc croire qu’ils se terminaient ainsi. Du reste, la taille de certaines pierres de moyenne dimension, en forme de pyramide, et retrouvées au