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Schultze, ont eu le courage méritoire de s’affranchir du mensonge convenu.

Sur l’origine même du conflit, Ottokar Lorenz dit : « Considérée au point de vue du droit des gens, la théorie de M. de Bismarck était à peine soutenable. Toutes les candidatures au trône qui se sont déroulées dans le XIXe siècle, en Espagne, en Portugal, ont été constamment l’objet de négociations internationales, et les Cobourg en Belgique, comme les Danois en Grèce et les Hohenzollern en Roumanie, ont fourni d’indubitables exemples, que de tels établissemens dynastiques ont toujours été précédés d’une entente entre les puissances intéressées dans les négociations… Personne n’aurait pu nier que la prétention du gouvernement prussien de ne pas devoir s’occuper d’une telle affaire se manifestait et devait paraître comme un principe nouveau dans l’histoire diplomatique. Le refus du gouvernement prussien de faire connaître sa manière de voir sur cette question, sous prétexte qu’elle ne concernait pas l’État, augmentait les difficultés de la tâche de Benedetti, parce qu’il devait puiser, dans les assertions de M. de Thile, le soupçon qu’il se tramait quelque chose que l’on voulait dissimuler, du côté prussien. » Il apprécie non moins justement les péripéties du 13 : « Mais à la date du 13, Dieu soit loué ! un esprit digne du grand Frédéric s’était déjà éveillé dans la nation allemande. On était non seulement résolu à se battre, mais on désirait écraser les Français et les anéantir. C’était l’esprit de 1813. Le grand homme d’Etat fit tout pour déterminer une lutte décisive, prompte et radicale, et pour empêcher qu’une paix boiteuse pût intervenir. Les historiens timorés ont coutume de ne rien dire, ou ne mentionnent que d’une façon très atténuée la décisive habileté diplomatique que Bismarck mit en œuvre pour attiser l’excitation belliqueuse en France. Tandis qu’il montrait par des résolutions hardies que les traditions de la politique prussienne, comme celle du « Grand Fritz, » qui savait au besoin passer le Rubicon, n’étaient pas tombées dans l’oubli, ces historiens timorés lui font encore jouer le rôle de l’agneau que menace le loup sur le bord du ruisseau. Mais, heureusement, le tableau est fort changé le 13 juillet ; et c’est Bismarck qui se trouve le loup sur le bord du ruisseau. »

Hans Delbrück a très bien caractérisé la fin de non recevoir sophistique de Bismarck : « Bismarck a cru couvrir son acte du