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résolue à ne tolérer aucune entreprise téméraire. Que notre auguste souveraine redevienne dépositaire du pouvoir impérial ; les grands corps de l’Etat l’entoureront de leur respectueuse affection, de leur absolu dévouement. La nation connaît l’élévation de son cœur et la fermeté de son âme ; elle a foi dans sa sagesse et dans son énergie. Que l’Empereur reprenne avec un juste orgueil et une noble confiance le commandement de ses légions agrandies de Magenta et de Solférino ; qu’il conduise sur les champs de bataille l’élite de cette grande nation. Si l’heure des périls est venue, l’heure de la victoire est proche. Bientôt, la patrie reconnaissante décernera à ses enfans les honneurs du triomphe ; bientôt, l’Allemagne affranchie de la domination qui l’opprime, la paix rendue à l’Europe par la gloire de nos armes, Votre Majesté qui, il y a deux mois, recevait pour elle et pour sa dynastie une nouvelle force de la volonté nationale, Votre Majesté se dévouera de nouveau à ce grand œuvre d’améliorations et de réformes dont la réalisation, — la France le sait, et le génie de l’Empereur le lui garantit, — ne subira d’autre retard que le temps que vous emploierez à vaincre. »

C’était le discours que la Droite n’avait pas pu obtenir de moi dans la séance du 15 juillet, une contre-déclaration, le programme du parti de la guerre mis en présence du nôtre. Notre déclaration ne désavouait pas la demande de garanties, car c’était impossible, mais elle ne la glorifiait pas non plus : surtout, elle ne faisait pas du refus qu’on lui avait opposé la cause de la guerre. La cause unique qu’elle donnait à la guerre, c’était le soufflet d’Ems dont Rouher ne parlait même pas. Nous nous étions efforcés de ne pas élargir le débat, de le renfermer dans l’affaire Hohenzollern, et de présenter la guerre comme un fait inopiné, subi et non désiré par nous ; Rouher la présente comme le résultat d’un long désir de quatre ans et d’une attente préméditée. Autre est le ton de la réponse de l’Empereur ; pas de fanfaronnades : « Nous commençons une lutte sérieuse. » Et discrètement il se solidarise avec les idées de son ministère et non avec celles de Rouher, en remerciant le Sénat « du vif enthousiasme avec lequel il avait reçu la déclaration que le ministre des Affaires étrangères avait été chargé de lui faire. » Mais ce redressement était tellement discret et enveloppé, que le public ne le comprit même pas. Il ne retint que les affirmations fanfaronnes et compromettantes de Rouher.