Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 51.djvu/486

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Nous ne pouvons pas laisser passer sans le mentionner, bien qu’il soit déjà vieux de quinze jours, un fait qui a libéré, non seulement la Hollande, mais l’Europe, d’une préoccupation qui aurait pu devenir assez lourde : la jeune reine Wilhelmine a mis au monde une fille, et sans doute, libérée désormais de l’espèce de mauvais sort qui semblait la poursuivre, aura-t-elle encore d’autres enfans. Au surplus, sa seule vie a assuré autrefois la perpétuité de la dynastie : il en serait éventuellement de même de la vie de la fille qu’elle vient de mettre au monde, la petite princesse Juliana. La naissance de celle-ci était attendue en Hollande avec une impatience mêlée d’anxiété, et la nouvelle en a été accueillie avec de grandes démonstrations de joie. Ce sentiment est naturel à un double titre, d’abord parce que la Hollande tient à sa dynastie historique. — et elle a raison d’y tenir car sa dynastie a été glorieuse et bienfaisante, — ensuite parce que, si la maison d’Orange venait à s’éteindre, des compétitions assez confuses risqueraient de se produire autour de la couronne restée vacante, sans que cette couronne pût être attribuée à un prince vraiment néerlandais. Alors il serait à craindre que le lien qui unit la Néerlande à sa dynastie ne se relâchât quelque peu. Enfin les diverses puissances européennes auraient peut-être été tentées de favoriser des prétentions différentes, en dépit de tant d’expériences qui ont montré combien étaient le plus souvent illusoires les espérances fondées sur la politique de famille, et on voit d’avance les inconvéniens qui auraient pu en résulter. Pour tous ces motifs, les regards du monde se tournaient du côté de la Hollande pendant les derniers jours qui ont précédé la délivrance de la reine Wilhelmine, ut on a éprouvé un réel soulagement lorsqu’on a appris que, cette fois enfin, un enfant était né. La France n’est pas limitrophe à la Hollande, mais elle en est voisine, et elle avait intérêt à ce qu’aucun problème nouveau, difficile, délicat, ne vînt à s’y poser. Elle n’a d’ailleurs que de l’amitié pour ce pays, en même temps qu’une respectueuse sympathie pour sa gracieuse souveraine. Nulle part on n’a applaudi de meilleur cœur à la nouvelle que la couronne de Hollande avait une héritière, et la maison d’Orange un rejeton vigoureux.

Francis Charmes.
Le Directeur-Gérant,
Francis Charmes.