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à peine réglé que des embarras analogues surgissaient à propos de la République Dominicaine, dont les créanciers réclamaient à leur tour une intervention de leur gouvernement. Afin d’éviter une semblable éventualité, M. Roosevelt concluait en janvier 1905, avec les autorités de Saint-Domingue, un accord suivant lequel les Etats-Unis acceptaient de jouer le rôle de liquidateurs financiers de la République et géreraient ses douanes jusqu’à complet règlement. Dans son message transmettant cet accord au Sénat, le président s’expliqua sur les obligations qui lui paraissaient découler de la doctrine de Monroe : « Depuis quelque temps déjà, il est devenu évident que ceux qui tirent avantage de la doctrine de Monroe doivent accepter, corrélativement avec les droits qu’elle leur donne, certaines responsabilités et que les mêmes principes s’appliquent à ceux qui s’en font les soutiens. On ne peut trop souvent et trop emphatiquement répéter que les Etats-Unis n’ont pas le moindre désir de réaliser un agrandissement territorial aux dépens de leurs voisins du Sud, et qu’ils ne se serviront pas de la doctrine de Monroe pour justifier un pareil agrandissement. Nous ne nous proposons de prendre aucune partie de Saint-Domingue, ni d’exercer d’autre domination sur l’île que celle qui sera nécessaire pour assurer sa réhabilitation financière… Les Etats-Unis sont justifiés à prendre cette charge et cette responsabilité parce qu’il n’est pas compatible avec l’équité internationale qu’ils puissent s’opposer à ce que les autres puissances usent des seuls moyens à leur disposition pour faire respecter les droits de leurs nationaux créanciers, et refuser en même temps d’agir eux-mêmes. » Le gouvernement américain refusait son appui à la doctrine de Drago, mais, voulant éviter les dangers signalés par le ministre argentin, il affirmait son intention d’assumer la charge de tuteur des Républiques prodigues. L’intervention du « gendarme yankee » ne semblait pas à celles-ci plus désirable que celle de leurs créanciers européens ; sa proximité même la rendait plus aisée, partant plus redoutable.

La révolution de Panama vint encore augmenter la défiance des Républiques sud-américaines, à l’égard des Etats-Unis. Après la conclusion du traité de novembre 1901 avec l’Angleterre, par lequel celle-ci, consentant à l’abrogation du fameux traité Clayton-Bulwer de 1850, abandonnait le principe d’un condominium sur le futur canal interocéanique et de la garantie de sa neutralité par les grandes puissances, les Etats-Unis avaient négocié