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dont on les voit dans la santé. De plus, avez-vous jamais ouï dire : faire paraître les choses d’un œil ? »

Et Valincour, pour terminer, fait remarquer avec raison que c’est un livre très bien écrit que celui où l’on ne relève pas plus de fautes. Ainsi l’abbé d’Olivet, après un volume d’observations sur les fautes de Racine, déclarait, avec raison aussi, que rien plus que ce qui précédait ne prouvait qu’il y avait moins à reprendre dans Racine que dans les meilleurs auteurs de prose.

Ce qu’il y a de constant aussi, c’est que Valincour, quoique, à mon avis, ne comprenant vraiment pas le fond, le sens profond de la Princesse de Clèves, en sent toutefois, fortement et délicatement, certaines beautés, en note certains défauts qui sont réels et se montre, à en examiner le style, un maître de la langue. Il faut, si l’on s’enquiert de bons livres pour apprendre la langue française, mettre les Lettres de Valincour sur la princesse de Clèves à côté du Commentaire de Voltaire sur Corneille.

On répondit à Valincour. En 1679 parut chez Barbin un petit volume sans nom d’auteur, intitulé Conversations sur la critique de la « Princesse de Clèves. » Il est attribué, depuis cette époque même, à l’abbé de Charnes. Dans la préface de cet ouvrage, l’auteur traite durement celui des Lettres à la Marquise. L’auteur des Lettres est un ignorant. Il n’a pas lu l’Origine des Romans (de l’évêque Huet). Il ne comprend pas Castelvetro. Il n’a pas entendu le dessein général de la Princesse de Clèves qui est de « faire voir par une fiction agréable que les plus innocentes galanteries entre personnes mariées ne causent que du malheur. » L’auteur des Conversations semble bien croire que l’auteur des Lettres est le Père Bouhours ; car il dit : « Pour bien juger [d’un ouvrage comme la Princesse de Clèves] il faut être autre chose que grammairien ; il faut avoir appris par une grande expérience du monde à bien juger des bienséances et avoir étudié les passions que l’on représente. » Or on ne voit pas par ces Lettres que leur auteur « ait la connaissance du monde, ni les sentimens des personnes élevées et agitées des passions qui sont dépeintes dans la Princesse de Clèves. »

Suivent trois « conversations, » dont la première roule sur la conduite de l’ouvrage, l’autre sur les sentimens des personnages, la troisième sur le style.

Relativement à la critique, que fait l’auteur des Lettres, de Nemours s’avançant jusqu’à la fenêtre du pavillon pour se