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de marchés nouveaux et à la formation d’une police pour en assurer la sécurité. Le reste ne nous regarde pas. Au surplus, si des marchés suffisamment nombreux s’établissent en effet et si des échanges s’y produisent avec activité, l’état matériel et moral de ces provinces frontières ne tardera pas à s’en ressentir, et beaucoup de questions qui n’ont pas connu jusqu’ici d’autre solution que la force se résoudront par cette intervention des intérêts dont nous avons déjà indiqué la puissance. En tout cas, il y a là une expérience à faire ; on l’a entamée et les résultats jusqu’ici ne sont pas de nature à décourager.

L’ordre du jour de confiance dans le gouvernement « pour poursuivre au Maroc la politique de collaboration et de civilisation que lui dictent ses traditions, ses intérêts, ses accords et les engagemens pris à Algésiras, » a été voté par 380 voix contre 98. C’est une belle majorité : nous doutons que le ministère la retrouve aussi compacte lorsqu’il s’agira de sa politique intérieure.


Il faut souhaiter que, d’ici à quelque temps, nous n’ayons pas à parler de nouveau du Maroc ; mais on ne saurait espérer qu’il en sera de même des Balkans. Là plusieurs questions très graves sont encore en suspens, et on n’aperçoit pas très bien comment elles pourront être résolues, si ce n’est par l’action du temps qui use et concilie finalement beaucoup de choses en apparence irréductibles. Un pas important a déjà été fait. Au moment où nous écrivions, il y a quinze jours, l’accord s’établissait entre l’Autriche et la Turquie ; la nouvelle en circulait déjà, elle a été confirmée depuis, et la situation générale de l’Orient en a été modifiée d’une manière assez sensible. La Porte s’est montrée habile en traitant avec l’Autriche, qui était, en somme, pour elle la partie adverse la plus considérable, et dont l’opposition encourageait et soutenait celle de la Bulgarie. Cela ne veut pas dire que la Bulgarie ne saura pas défendre ses intérêts avec beaucoup de vigueur, mais elle est seule aujourd’hui en face de la Porte et sa situation en est, dans une certaine mesure, affaiblie. Nous croyons d’ailleurs qu’on s’entendra, et qu’après quelques démonstrations où chacune des deux puissances essaiera de donner la mesure de sa force, — on arme en ce moment, en Bulgarie, on appelle une partie des réserves et on les concentre sur la frontière, — le bon sens l’emportera, une transaction honorable sera conclue, et la paix sera maintenue.

Tout le monde travaille pour la paix. M. Jaurès lui-même a été