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petites, on peut tout de suite remarquer que l’on est très incomplètement renseigné à leur égard et qu’une statistique est au moins prématurée.

Il n’y a pas si longtemps que, revenant à des points de vue spécialement chers aux astrologues du moyen âge, des physiciens rattachaient les tremblemens de terre à des conjonctions ou à des oppositions, en somme à des situations relatives de planètes. Et, comme ces positions sont connues d’avance, on devait logiquement en tirer un système de prophéties, qu’il serait fort utile de connaître. Je n’oublierai jamais la foi profonde, quoique non communicative, de Silbermann, qui fut préparateur au Collège de France, il y a une trentaine d’années, et qui est connu encore pour ses travaux sur les aurores boréales et sur les étoiles filantes, — ni sa consternation, — lorsque ses études le mirent en présence de cette conclusion que : vu la situation des astres, Paris, à telle date très rapprochée, serait entièrement anéanti par un gigantesque tremblement de terre. Il prit alors ses dispositions pour émigrer en Suisse, dont il jugeait la situation plus stable, et, malgré son état de fortune qui ne lui permettait aucun luxe, mû par un sentiment de charité, il conserva plusieurs jours de suite une voiture à l’heure, pour aller d’ami en ami annoncer le péril et prêcher la fuite. Je fus du nombre des personnes prévenues et vraiment il y avait de quoi en être touché.

Huit jours après la date fatale, Silbermann, de retour à Paris, démontrait que la « déception » venait d’une erreur de calcul dont il reconnaissait la gravité, mais qui ne touchait en rien à la réalité des principes d’où il était parti. Plus récemment, vers 1890, un certain docteur Falb, de Vienne, a jeté l’angoisse dans bien des âmes, en annonçant, aussi d’après des observations du même genre, la date de tremblemens de terre qui, Dieu merci ! ne se sont pas plus produits que celui de Silbermann.

M. de Montessus de Ballore, dans son magistral ouvrage[1], s’élève contre ces rapprochemens :

« Que reste-t-il des innombrables travaux, dit-il, consacrés à la recherche des relations supposées souvent a priori ou sur la foi de quelque coïncidence fortuite, entre les tremblemens de terre et des phénomènes variés extérieurs à l’écorce terrestre ?

  1. La Géographie séismique, 1 vol. in-8, Paris, 1907.