Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 49.djvu/189

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Les transformations de l’industrie moderne, l’industrialisation de l’agriculture, la multiplication des travaux saisonniers, la rapidité avec laquelle on entend mener à fin des entreprises exceptionnelles, la suppression graduelle de l’apprentissage, la facilité qu’ont les « sous-prolétaires » et les faux chercheurs de travail d’aller se mêler aux grèves et quelquefois de les provoquer pour y bénéficier des « secours de chômage, » tout cela rend certainement plus difficile de distinguer ce que diverses législations appellent le vagabond intéressant et le vagabond non intéressant. Mais les complaisances gouvernementales ajoutent à la difficulté en décourageant la police de s’appliquer à la résoudre correctement. Ici on préconise une assistance abusive en ouvrant des maisons, pour ne pas dire des cités, où se prodigue une bienfaisance que le premier venu peut accepter, abandonner, reprendre à volonté. Là on laisse le chemineau vivre sur le commun. Le plus souvent on cumule les deux systèmes, de manière à laisser les irréguliers user à leur gré de l’un, puis de l’autre. Jadis les vagabonds abusaient, — surtout en hiver, — de la prison qu’ils aimaient, qui les corrompait encore davantage. Ils abusent maintenant, et de plus en plus, de l’indulgence qui leur laisse la bride sur le cou. C’est là un des aspects les plus irritans du problème pénal.

Mais ce n’est pas seulement devant le sous-prolétariat que les transformations du droit public ont désarmé la propriété si chère à nos aïeux ; c’est aussi devant les aventures d’un esprit d’entreprise considérablement élargi. Maintenir contre les déconfitures financières les sévérités jadis déployées contre les banqueroutiers n’était pas difficile. Le législateur a été touché de l’étendue des nouveaux risques et du nombre de ceux qui y succombaient. Il n’a pas voulu voir là un crime irrémissible. Il a introduit la liquidation judiciaire et donné plus de facilité ? aux faillis. Il a été frappé de l’immensité du rayon dans lequel opèrent les acheteurs, de l’impossibilité de satisfaire tous les besoins avec l’unique système des opérations au comptant. Il a donc donné à la spéculation des droits nouveaux ; il l’a allégée de cette espèce de tare dont abusaient les spéculateurs de mauvaise foi en alléguant l’exception de jeu. Mais voici que l’exploitation du public par les sociétés anonymes et par les roueries des monteurs d’affaires ne cessent de provoquer des plaintes. En dépit de cette assertion dont on abuse, que l’histoire du droit