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— « C’est moi, Ginevra... votre femme !... »
— « Je ferai prier pour ton âme ;

Toi qui sors du tombeau, va-t’en !...
Les spectres viennent de Satan ! »

Les spectres n’ont pas de demeure.
Faudra-t-il que la morte meure ?

Alors, dans ce grand abandon,
Elle songe à l’ami si bon

Qui l’aima, d’une amour suprême
Dont il n’a parlé qu’à lui-même...

— « Vivante, je le fis souffrir :
A la morte va-t-il ouvrir ?

Ouvrez !.., c’est moi !... » — L’ami fidèle
Veillait, priait, le cœur plein d’elle.

Il reconnut son premier cri,
Bondit vers la porte et l’ouvrit :

— « Vous que, vivante, j’ai pleurée,
Entrez vite, morte adorée !

Morte ou vivante, spectre ou non,
J’ouvre à qui porte votre nom.

J’ouvre à votre voix bien connue !...
Vous frissonnez, à demi nue,

Cherchant un asile... Voici :
Mon cœur est ouvert ; entrez-y.

Vivante, oubliez votre fièvre,
Ou morte, dormez sous ma lèvre...

Vision ou réalité,
Je t’aime dans l’éternité. »


JEAN AICARD.