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en lui permettant de les prolonger, si elles rendent la prise de contact beaucoup plus dure pour les deux adversaires, elles favorisent l’offensive dans sa plus forte expression, dans l’attaque défensive, à une condition toutefois, condition formelle, que le ravitaillement soit assuré de manière à faire face à toutes les existences.

L’attaque sur Saint-Privat, telle que je viens de l’esquisser, exigerait peut-être 700 ou 800 coups pour chacune des pièces des batteries dites d’infanterie : les contre-batteries tireraient peut-être beaucoup moins ; quant aux autres, elles n’auraient peut-être pas l’occasion de tirer si l’incident auquel elles doivent parer ne se produit pas.

Cette évaluation me conduit à montrer ce qui se passera dans le très long combat de préparation. Celui-ci se compose, comme on le sait, d’une série d’attaques partielles de corps d’armée, de divisions, de brigades, dirigées sur les différens points d’appui occupés par l’adversaire. Chacune de ces attaques serait aussi facile, aussi peu coûteuse en hommes que l’attaque décisive telle que nous l’avons envisagée, si chacune d’elles pouvait être montée avec la même puissance de moyens, disposer des mêmes ressources en munitions. Toute la difficulté réside dans l’approvisionnement et le ravitaillement.

En effet, l’attaque d’un point d’appui peu étendu, comme une ferme, ou un bouquet de bois, exigerait peu de batteries pour tenir en respect le défenseur : mais il faudrait toujours, pour protéger les flancs de l’assaillant, battre un front d’infanterie et surveiller un front d’artillerie considérable. On le pourrait par une concentration des forces, voulue et ordonnée par le commandement local ; mais, si on évalue la quotité de munitions nécessaires pour accomplir un pareil acte, qui se reproduira plusieurs fois chaque jour, on comprend l’impossibilité d’appuyer les attaques partielles avec la même énergie que les attaques décisives : il faudrait supposer un ravitaillement inépuisable. Aussi, — sans parler, bien entendu, du facteur moral, — la question du ravitaillement domine tout dans la guerre moderne. Plus les moyens de ravitaillement seront puissans, plus les attaques seront facilitées ; tous les efforts doivent donc porter, en ce moment, sur l’approvisionnement. Le véritable moyen d’être maître du champ de bataille est d’écraser l’ennemi par nos feux. L’armement actuel eu donne la possibilité. Je voudrais