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un jour l’organisation d’un obus explosif ou d’un shrapnel d’un très petit calibre. Un autre avantage du tir percutant, et non le moindre, est la grande simplicité de son emploi qui compensera souvent, et au delà dans bien des cas, la supériorité du 75. Je suis convaincu que des officiers de réserve et même beaucoup d’officiers de l’armée active tireraient un bien meilleur parti sur le champ de tir, et mieux encore sur le champ de bataille, d’une batterie de pom-poms que d’une de 75.

Pourquoi donc l’hostilité presque générale contre le canon à tir percutant extra-rapide de petit calibre ? Au commencement du XIXe siècle, Scharnhorst, qui avait assisté aux batailles du premier Empire, disait que le seul avantage des gros canons sur les petits était leur plus grande portée. Cette phrase n’a pas été assez méditée.

La guerre de 1870-1871, pendant laquelle nos canons de 12, dont l’obus pesait 12 kilogrammes, étaient seuls en mesure de lutter contre les canons prussiens, a déterminé un engouement irréfléchi pour les gros calibres. On ne se demandait pas pourquoi il nous fallait un projectile de 12 kilogrammes pour lutter contre l’artillerie opposée, qui lançait des obus de 4 et 6 kilogrammes ; pourquoi aussi nous ne faisions aucune différence entre les effets de leurs batteries de 4 ou de 6. Si les obus allemands (le 4 avaient le dessus sur nos obus de 12, c’est parce que les progrès balistiques, depuis la création de notre premier matériel rayé, avaient permis de donner à ces projectiles légers des portées supérieures à celles de notre 12. À ces portées, notre canon de 4 était impuissant ; l’insuffisance de ce dernier ne tenait donc nullement au poids du projectile, qui était le même que celui des obus allemands, mais au défaut de ses qualités balistiques.

Aujourd’hui les progrès de la science donnent la possibilité d’envoyer jusqu’aux grandes portées de combat, généralement limitées par la visibilité, des projectiles beaucoup plus légers.

Mais les préjugés sont tenaces ; certains esprits ne se rendent pas compte comment ce qui n’était pas réalisable hier l’est devenu aujourd’hui. Rien n’empêche plus la création d’un pom-pom sérieux, rien, — sinon la routine.

Je ne parle que de la guerre de campagne ; au contraire, s’il s’agit d’attaquer des fortifications permanentes, je demande les calibres les plus gros et les plus puissans.