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vie ? — Aimez. Ceux qui n’aiment pas ne sont pas vivans et ne peuvent entendre. Mais par l’amour, toute âme peut connaître le secret de Dieu. »


En même temps que la justesse du sentiment poétique qui se révèle dans cette pièce, on peut y apercevoir un des traits qui caractérisent l’imagination de M. van Dyke ; c’est l’union de deux qualités qui souvent s’excluent : l’ampleur et la minutie. Sa poésie est parfois grande, elle n’est jamais vague ; et d’autre part, les détails, précis et colorés, ne distraient jamais du dessin général parce qu’une même impulsion les anime tous. Ce caractère se retrouve dans tous les poèmes de M. van Dyke, qu’ils appartiennent à l’une ou à l’autre des catégories dans lesquelles on peut les classer : poésies lyriques, poésies d’intimité, poésies de pure nature.

Un des meilleurs parmi ses poèmes lyriques, avec Véra, Music dont nous reparlerons, et la méditation sur les deux demeures de la Paix, est ce cantique : God of the open air, où le poète implore Dieu à travers le monde qui est son temple immense ; dans ces strophes d’invocation renouvelées une fois de plus du Cantique des Cantiques, mais avec un accent très personnel, il y a de très beaux mouvemens de poésie large et pénétrante, des intuitions rares, et des développement heureux de cette idée que notre âme devrait être docile et souple, et confiante comme toutes les choses de la création.

Il y aussi quelques légendes parmi ces poèmes lyriques. J’avoue ne pas goûter beaucoup ceux qui sont uniquement mystiques et qui me semblent un peu prédicans, mais le symbolisme est charmant qui a créé la légende de l’Essaim des Abeilles blanches ; ce sont les flocons de neige : abeilles inconnues des saisons ensoleillées, dont les ruches mystérieuses sont aux vergers célestes, et qui, lorsque la beauté de la dernière fleur est morte, descendent d’un vol paresseux, obscurcissant le ciel de leurs essaims compacts, et se posent sur la terre sans que le silence soit troublé par leur chute. « Où est leur reine ? Qui est leur Maître ? Quel miel caché cherchent-elles sur la terre aride ? quelle douceur secrète veulent-elles recueillir dans ce jour désolé où nulle fleur ne luit ? » Pendant la nuit, le vent se lève et pourchasse les abeilles, les remmène au ciel en tourbillons, et, le lendemain, quand le soleil brille, le miel blanc des