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peine de ne pas travailler, pourra de moins en moins s’y soustraire. Le reste, universités populaires, cercles d’études, comités même, — sauf les formations proprement actives, les sections du parti socialiste dit unifié, — il est peut-être permis d’en faire pour quelque temps assez bon marché, de n’y voir guère que des parlotes, et de ne pas leur accorder d’autre importance que celle que peuvent avoir des couveuses à politiciens. Mais je dis seulement pour quelque temps, et ici, en dépit du proverbe, il ne faudrait pas donner trop de temps au temps, qui ne serait probablement pas galant homme. L’usine et le syndicat suffisent d’ailleurs, nous l’avons montré, à préparer pour les batailles électorales cette fraction considérable du nombre, les ouvriers de l’industrie, à laquelle sa concentration même donne une force bien plus considérable encore, et qui, étant la plus maniable, pourrait être, dans ces batailles, la plus considérable des forces.

On peut répondre que jusqu’à présent il n’y a pas paru, au moins d’une manière éclatante, que les batailles électorales ont été engagées sur un terrain choisi par d’autres, et que, si la classe ouvrière a pu fournir son contingent, ce n’est pas elle qui a fourni les cadres. Oui, de par l’espèce de loi historique qui fait de la question religieuse, depuis des siècles, le fond de toutes les querelles dans ce pays, parce qu’aussi ils ont gardé la superstition de « l’homme instruit, » et que l’homme instruit, pour eux, c’est le bourgeois radical, parce que certains d’entre eux éprouvent une sorte de haine animale contre « la calotte, » et que beaucoup qui ne l’éprouvent pas font, pour ne pas se faire « blaguer, » comme s’ils l’éprouvaient, les ouvriers ont en majorité, vraisemblablement (autant qu’il est permis de le conjecturer), apporté leur appoint à la bourgeoisie radicale, à cause de son anticléricalisme affiché qui les attire, sans que la vulgarité, la pauvreté d’esprit, la médiocrité, la nullité de cette bourgeoisie les repousse. Ceux qu’on appelle les meneurs savent du reste ce qu’on peut tirer d’elle, comment on peut la faire marcher, jusqu’où l’on peut la faire aller par la menace, et de quoi elle a peur. Ils la tiennent plus qu’elle ne les tient.

Au surplus, tous les sujets s’usent, même ceux qu’on eût dits éternels ; celui-là, l’anticléricalisme, est déjà à demi, et sera bientôt tout à fait usé. Alors, d’autres questions, de celles que, ne le voulant pas ou le voulant, maladroitement ou trop