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des générations. Il leur manque la patine que les saisons déposent, en se succédant, sur la demeure du paysan, en harmonie avec son visage où s’expriment la ténacité des efforts héréditaires superposés lentement et la confiance tranquille en la seule durée des contingences qui résultent de la terre. Aussi faut-il laisser au temps le soin d’éprouver la qualité des âmes qui s’additionneront dans ce village, posé sur ce sol, par ordre.

Aujourd’hui, la Commission se borne, d’ordinaire, à fournir l’architecte, les ouvriers et les matériaux, au nouveau venu qui se loge selon son goût et les habitudes de son pays d’origine. En vingt ans, l’État et les colons ont bâti, pour 100 millions de marks, 300 mairies, 270 écoles, 35 églises, 37 presbytères, 23 hospices, 210 auberges, 11 360 maisons de paysans, 295 logemens ouvriers.

Un principe préside au partage du sol. Chaque lot doit être assez grand pour nourrir et occuper une famille. La propriété paysanne que le possesseur cultive sans le secours de travailleurs étrangers forme la colonne vertébrale du système de colonisation prussienne.

Elle est d’étendue variable selon les régions et la nature du terrain. Les villages de l’Est ont servi de patron pour le morcellement, puisqu’ils sont la résultante du mouvement séculaire de répartition des terres. La grandeur moyenne des parcelles paysannes varie entre 10 et 20 hectares. Dans le voisinage des villes, où la culture maraîchère permet au possesseur de subsister sur une plus petite surface, on a fait des parcelles de 5 à 10 hectares. Aux artisans installés dans les colonies, forgerons, menuisiers, cordonniers, on a concédé de 2 à 5 hectares ; aux ouvriers agricoles un jardin et un petit champ de moins de 2 hectares, autour de la maison. Les lots de 50 à 120 hectares, et au-dessus, sont en petit nombre. Ils n’ont pas donné de bons résultats politiques, car ils dépendent de la main-d’œuvre polonaise.

Les 325 993 hectares achetés, de 1886 à 1906, ont été divisés en 12 813 parcelles, sur lesquelles sont déjà établies 11 957 familles de colons, formant une population d’environ 100 000 âmes.

Pour attirer les colons, la Commission a dans différentes provinces, une dizaine d’agens qui font de la propagande et fournissent les renseignemens nécessaires. A Thorn, un homme