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ont été « tirés à la roue. » Aussi les séances se prolongent-elles démesurément ; jusqu’à minuit ou une heure du matin, sans qu’il y ait eu parfois une demi-heure de délibération utile. On croit justifier cette méthode en alléguant la nécessité d’habituer tout le monde à diriger les débats. Malheureusement, l’expérience problématique que les administrateurs ont pu acquérir ne trouvera jamais d’emploi ; car il est fort rare que les mêmes hommes restent longtemps au Conseil. La durée du mandat est presque partout de dix-huit mois ; souvent même, les conseillers sortans sont inéligibles pendant un an, et, de toute façon, ne sont ordinairement pas réélus. Celui qui a pu conserver son mandat pendant plus de deux ou trois ans est considéré comme un survivant phénoménal des âges héroïques.

L’existence bureaucratique des secrétaires, trésoriers, administrateurs délégués, renouvelables tous les six mois par le Conseil, est plus brève encore. Aussi, personne ne possédant qu’une parcelle d’autorité, et personne ne la possédant longtemps, il n’y a nulle part d’autorité visible. Aucun de ces fonctionnaires improvisés et éphémères ne se sent responsable ; aucun n’a le pouvoir de se défendre contre les empiétemens d’un collègue, même simple administrateur, qui, au hasard de visites improvisées, peut affaiblir la portée de ses ordres.

En principe, le Conseil d’administration a le souverain rôle, et il lui appartient de maintenir l’unité de direction. Mais il n’apparaît dans la plénitude de ses pouvoirs qu’une ou deux fois par semaine ; la direction générale échappe à ses membres mal informés. Cependant les menus détails encombrent ses délibérations. L’affaire la plus simple, mais aussi la plus urgente, après lui avoir été tardivement soumise, est renvoyée à une commission, pour lui revenir encore plus tard, en seconde lecture, enrichie d’un beau rapport. La lettre la plus pressée est décachetée en séance ; et, certes, ce n’est pas dans les bureaux des grands services publics qu’il faut chercher les meilleurs exemples de lenteur administrative, c’est dans les sociétés coopératives ouvrières de Paris.

Les commissaires de surveillance, élus dans les mêmes conditions que les administrateurs, ont le devoir, très limité par la loi, de vérifier la comptabilité, de certifier l’exactitude du bilan, et de veiller à l’observation des dispositions statutaires. En Angleterre et en Allemagne, ces commissaires sont de