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frontières, entouré de deux armées ennemies ; il se retire ; mais ne cesse de combattre.

A Bibrac, il met en déroute celle qui le suit et « passe sur le ventre » de celle qui veut s’opposer à son passage. Quelques jours plus tard, franchit le Rhin à Bibrac et à Huningue, sans la moindre perte, fait 7 000 prisonniers, prend des drapeaux et une quarantaine de canons. Il concourt à la défense d’Huningue et du fort de Kehl, assiégés par les Autrichiens, et retient sous les murs de ces places l’archiduc Charles, qui brûle de s’en emparer pour se porter en Italie. Lorsqu’elles se rendent, après avoir tenu, l’une deux mois, l’autre près de quatre, l’archiduc réalise son projet et part en emmenant 20 000 hommes. Mais Moreau détache des deux armées du Mein et de Sambre-et-Meuse, dont il réunit les commandemens en attendant l’arrivée de Hoche, 36 bataillons et 25 escadrons et les envoie à Bonaparte pour l’aider à tirer parti des avantages que lui ont valus les victoires d’Arcole et de Rivoli.

Presque aussitôt s’ouvre la campagne de l’an V. Le 1er floréal (20 avril 1797), Moreau prend l’offensive, tente de vive force et avec succès le passage du Rhin à la Wantzurer, quatre lieues au-dessous de Strasbourg ; le 2, à quatre heures de l’après-midi, il reprend le fort de Kehl, après quarante heures d’un combat opiniâtre. Il n’y a plus maintenant d’obstacle à la conquête de l’Allemagne d’où, l’année précédente, nous avons été chassés, et Moreau y poursuivrait sa marche si le traité de Leoben ne venait, à l’improviste, arrêter son armée.

Rappelé à Paris après le 18 fructidor, il y passe dans la retraite, avec son ami Kléber, l’année de la paix de Campo-Formio. Au commencement de l’an VII, il est envoyé à l’armée d’Italie comme inspecteur général d’infanterie. Mais, dès que reprennent les hostilités, Scherer qui la commande le met à la tête de deux divisions. A un combat qui s’engage le 16 floréal, elles forment l’aile gauche. « J’étais en marche pour un détachement qui m’avait été ordonné, raconte Moreau, lorsque j’entendis une attaque. Je pouvais d’autant mieux continuer ma marche à la destination qui m’était prescrite que je ne pouvais plus communiquer avec le général en chef dont je venais d’être séparé par l’ennemi. Mais l’habitude de commander m’avait fait juger la position de l’armée mauvaise. » Il revient alors sur ses pas, marche au canon et arrive à temps pour arrêter les Autrichiens qui