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indemnités justifiées par le bombardement de Casablanca ; une commission a été instituée pour en déterminer les chiffres ; on estime avec raison à Berlin qu’il convient de confirmer ses décisions. Restent les indemnités d’un autre genre, et beaucoup plus considérables, qui sont dues à la France et à l’Espagne à la suite des expéditions militaires de Casablanca même et de la Chaouïa. Le gouvernement impérial n’en conteste nullement la légitimité, et il admet que ce soit là une affaire à régler entre l’Espagne et nous d’une part et le Maghzen de l’autre. Il se borne à dire qu’il est « assuré que les deux puissances auront égard à la situation financière du Maroc, à l’assainissement de laquelle toutes les puissances ont un intérêt commun. » Commun, oui ; mais égal, non. La France est de beaucoup la principale créancière du Maroc ; elle est donc plus intéressée que personne à l’assainissement de ses finances. Si le Maroc venait à tomber au-dessous de ses affaires, la catastrophe atteindrait surtout nos nationaux : aussi apporterons-nous au règlement de cette situation tous les ménagemens nécessaires.

Dans un autre paragraphe de sa réponse, l’Allemagne se déclare prête à s’associer aux démarches à faire en commun pour demander à Moulaï Hafid qu’il « manifeste publiquement et officiellement sa ferme intention de conformer au droit des gens sa conduite envers les puissances étrangères et leurs nationaux, et de prendre sans délai les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et la liberté de circulation dans l’Empire chérifien. Le gouvernement allemand désire seulement qu’on laisse à Moulaï Hafid quelque franchise de mouvemens pour prendre ces mesures, afin d’éviter le retour de nouvelles excitations parmi les populations musulmanes qui menaceraient le maintien de la tranquillité et de l’ordre auquel toutes les puissances ont un commun intérêt. » Il y a deux choses dans ce passage : une obligation imposée à Moulaï Hafid, un conseil adressé à la France et à l’Espagne. La première partie du paragraphe pourrait être insérée telle quelle dans la communication qui sera faite ultérieurement au Sultan : évidemment, il n’en est pas de même de la seconde. Mais l’une et l’autre semblent s’appliquer à la partie de la note franco-espagnole qui demandait au Sultan le désaveu formel et officiel de la guerre sainte, au moyen de lettres chérifiennes adressées par lui aux villes et aux tribus. Nous serons très franc : les gouvernemens français et espagnol auraient tort de tenir à leur rédaction. Un désaveu de la guerre sainte, fait par le Sultan dans les conditions ci-dessus indiquées, aurait pour lui de graves inconvéniens et n’aurait