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découvrir ses ossemens. Au Nord, c’est la longue île plate de Sriringam et ses petits îlots sablonneux que baignent les bras resserrés de la Cavery. Là s’élevait la grande chauderie où, en 1752, le détachement anglais se laissa cerner par les Français. Voici la Cavery qui longe la côte Sud de l’île, le Coleron, plus large, qui l’enserre au Nord. La pointe occidentale de Sriringam est occupée par un village et par la grande pagode de Vichnou. Celle de Çiva vient ensuite, vers l’Est, et c’est dans cette direction que s’écoulent les deux rivières. Le Colloway et ses petits bras, affluens de la Cavery, font du territoire de Trichinopoly une autre île qui égale Sriringam en largeur. Vers le Sud, des monticules se détachent : le Pain de Sucre et la Roche-d’Or, points extrêmes, cornes de ce croissant que traçaient les positions occupées, en 17S3, par les Français et leurs alliés, les Mysoriens et les. Mahrattes ; et encore, vers l’Ouest, le Bois du Derviche, ou Fakir’s Rock, que tenaient les Anglais. Si je regarde à l’Est, je vois ces collines d’Elmiseram, jadis surmontées de forts.

Que de deuils rappellent tous ces noms ! Trichinopoly toujours funeste aux armes françaises, je voudrais pouvoir oublier aujourd’hui ton Histoire ! Que je reporte mes yeux sur le quartier qui groupe sous mes pieds les habitations, les réservoirs, les allées de porchers, je découvre, enfouie sous la verdure, cette petite maison basse où demeura Clive, et je ne puis m’empêcher de comparer l’activité inlassable de cet homme de tête et de main à l’incapacité physique de Dupleix que le tumulte des armes effrayait. Tandis que Dupleix prétendait diriger les opérations de son palais de Pondichéry avec la collaboration de sa femme, Clive courait l’épée à la main et réussissait à communiquer son âpre énergie à ses troupes. Ce grand homme qui débuta par être petit commis dans l’administration de la Compagnie anglaise, comprit vite que la victoire, dans ces pays indiens, est à celui qui prêche d’exemple sans ménager sa personne. À cette heure même de la nuit où le fastueux Dupleix dormait, en s lire té, à Pondichéry, son sommeil de nabab, entouré comme un Roi, Clive faisait le coup de pistolet contre les troupes françaises dans cette surprise de la pagode de Mariammin, à Samiaveram, où il faillit perdre la vie, le 20 avril 1752.

Si ma vue pouvait s’étendre jusqu’à huit milles vers le Nord, dans la direction de l’ancienne route de Madras, je le verrais,