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immeubles situés en Belgique et sur la côte d’Azur (au cap Ferrat). Parmi ces immeubles, il en est une partie dont le Roi garde l’usufruit sa vie durant. Au Congo (dans le Mayumbé) il se réserve, en pleine propriété, 40 000 hectares de terres pour y poursuivre des expériences de culture en caféiers et cacaoyers. La cession est grevée de nombreuses obligations, savoir :


Une rente de 120 000 francs au prince héritier jusqu’à ce qu’il monte sur le trône et une rente de 75 000 francs à la princesse Clémentine jusqu’à son mariage ; une rente de 60 000 francs aux administrateurs de la Fondation et à leur personnel ; une subvention annuelle de 65 000 francs aux missionnaires de Scheut. Une somme de 400 000 francs doit être consacrée, chaque année, au maintien, au renouvellement et au développement de certaines collections coloniales et aux serres tropicales de Laeken. L’État belge s’engage à respecter les concessions faites, il y a quelques mois, à l’American Congo Company et à la Compagnie forestière et minière. Il prend à sa charge tout ce qui, dans les sommes dues par la Fondation de la Couronne, intéresse spécialement la Belgique. Cette charge s’élève à 1 133 000 francs. L’État Belge est substitué aux droits et aux obligations de la Fondation concernant les travaux somptuaires commencés ou projetés à Bruxelles, à Ostende et à Laeken. Un fonds spécial de 45 millions (le Roi en demandait 60) sera créé, et affecté au paiement de ces travaux, sous le contrôle de la Cour des comptes.

Il y aura en outre à créer, à charge de la colonie, un fonds spécial de 50 millions, payables en 15 annuités. Ce fonds est attribué au Roi, en témoignage de gratitude, et doit être affecté par lui (et, pour le fonds non engagé à sa mort, par ses successeurs) à des destinations à son choix mais toujours relatives au Congo.


Ces conditions assez onéreuses ont immédiatement soulevé de nombreuses objections. De même qu’un légataire n’accepte que sous bénéfice d’inventaire un héritage impliquant des charges et des responsabilités considérables, les Belges, gens en général fort pratiques, avant d’accepter les cadeaux qu’on fait ainsi miroiter devant leurs yeux, demandent à vérifier. Jusqu’à ces derniers temps, ils ont été très imparfaitement renseignés sur la situation financière du Congo, car toutes les questions posées à ce sujet étaient écartées par le gouvernement comme indiscrètes ou inopportunes. Ainsi, de 1893 à 1906, l’État indépendant s’est borné à publier, au début de chaque exercice, les prévisions budgétaires sans révéler ensuite si elles avaient été atteintes ou dépassées. Nous savons aujourd’hui que le déficit a été la règle durant cette longue période ; depuis 1900 seulement, recettes et dépenses s’équilibreraient aux environs de 35 millions