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vraisemblable que cette longue rivalité des deux assemblées aboutira à une très raisonnable et féconde solution, à l’établissement du Référendum en Angleterre. Le modus vivendi, établi entre la haute assemblée et la Chambre des communes, aura ce résultat immédiat de supprimer une tension pénible et de rendre aux institutions parlementaires leur jeu normal. Le Home Rule est une question réservée. Mais, avec Campbell Bannerman, disparaît, je crois, la dernière chance offerte aux Irlandais par les imprudentes promesses du discours de Glasgow et repoussée, plus imprudemment encore, l’an dernier, par M. Redmond sous la forme de la loi de Dévolution. Le présent Parlement n’arrivera pas à l’expiration de son mandat sans que M. Asquith ait donné satisfaction à ses amis, les non-conformistes, en renouvelant, — cette fois avec de bien meilleures chances de succès, — l’effort tenté par lui pour la séparation de l’Église et de l’Etat, dans le pays de Galles et le Monmouthshire. Or, cette mesure amènera une furieuse résistance, car l’Eglise anglicane sait que les temps sont venus et que la séparation partielle précédera seulement de quelques années la séparation totale. Qu’on s’en afflige ou qu’on s’en réjouisse, l’Eglise d’Etat a vécu.

J’arrive aux deux questions qui intéressent, l’une directement, l’autre indirectement, le public français. Quelle sera l’attitude du Cabinet Asquith en matière de politique étrangère ? Quelle sera son attitude dans la crise de réorganisation sociale que nous traversons et où toutes les nations sont, jusqu’à un certain degré, solidaires les unes des autres ?

Sur le premier point, il n’y aura point de changement appréciable. Il y a bien peu de lumière à tirer des rares discours que M. Asquith a prononcés sur les problèmes de politique continentale, car aucun de ces discours, si je ne me trompe, ne s’applique plus à la situation actuelle. Il a exprimé, il y a une douzaine d’années, cette idée que l’Angleterre est une puissance navale et non une puissance militaire ; qu’elle a besoin d’une marine plutôt que d’une armée pour soutenir une politique purement défensive. Je ne sais s’il est toujours de cet avis. En tout cas, il n’empêchera pas son collègue du War Office, M. Haldane, de développer à son aise son plan d’armée territoriale et il laissera faire sir Edward Grey, qui, de l’aveu de tous, a si bien réussi au Foreign Office, sir Edward Grey, dirai-je aidé ? dirai-je inspiré ? par la haute personnalité qui a tant fait pour