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de Gisors, et le déambulatoire de l’église de Clermont-d’Oise : ils ont été offerts, les uns et les autres, par des confréries de cordonniers. Dans les plus petites villes, et jusque dans les villages, on trouve quelque trace des confréries ouvrières. A Villeneuve-sur-Yonne, le vitrail de Saint-Nicolas a été donné par les mariniers, qui s’étaient mis sous la protection du vieil évêque. A Mergey, dans l’Aube, les mariniers de la Seine avaient choisi comme patron saint Julien l’Hospitalier, le formidable batelier qui reçut Jésus-Christ dans sa barque. Ils firent raconter dans un vitrail, que le temps a respecté, sa merveilleuse histoire. A Créney, en Champagne, les vignerons donnèrent à l’église un vitrail où leur patron saint Vincent est représenté la serpe à la main. Beaucoup d’œuvres analogues subsistent encore aujourd’hui, mais il y en eut jadis cent fois plus.

Les confréries militaires ont laissé moins de traces ; non qu’elles n’aient demandé, elles aussi, aux artistes, les images de leurs saints, mais ces œuvres, quand elles subsistent, sont difficiles à reconnaître. Les statues de saint Sébastien et de sainte Barbe abondent dans les églises ou dans les musées. Plusieurs, sans doute, ornaient les chapelles où se réunissaient les archers, les arbalétriers ou les arquebusiers. Mais, faute d’une inscription ou d’un blason, nous en sommes réduits, la plupart du temps, aux conjectures. Les vitraux ne sont pas, en général, plus explicites. Il en est cependant qui portent leur origine écrite en toutes lettres. On peut voir à Saint-Nizier de Troyes une belle verrière du commencement du XVIe siècle qui représente le supplice de saint Sébastien. Le saint est criblé de flèches par des soldats romains qui portent le costume du temps de Louis XII. Dans le haut du vitrail, on lit cette brève invocation adressée au martyr : « Gardez vos confrères archers ! » Le vitrail de saint Sébastien est donc un présent fait par la confrérie des archers de Troyes à l’église Saint-Nizier. Une étude attentive permettra sans doute d’attribuer à la générosité des confréries militaires beaucoup d’œuvres d’art qui leur reviennent.

Mais c’est aux confréries pieuses que nous devons le plus de statues, de bas-reliefs, de vitraux. Elles avaient toutes, évidemment, une image de leurs patrons ; les anciens registres, « les martologes, » comme on les appelait, en parlent quelquefois. A Saint-Lô, la confrérie de Saint-Jean avait fait faire, pour l’église Notre-Dame, une statue de saint Jean-Baptiste, son patron. Les