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mortier, dont le toit en terrasse a disparu. Des arbres poussent entre les quatre murs. Sous mes pieds serpentent les murailles de gneiss, toujours bien appareillées, reliant les blocs, et, de place en place, une guérite ronde, sans doute européenne, est assise sur la roche.

Du mandapam hindouiste les piliers quadrangulaires, à retailles octogones, montrent encore les traces des remplis en briques qu’on maçonna, à l’époque, entre eux. Les bases ont été sculptées en bas-relief et le champ abaissé tout autour des sujets, de telle manière que ceux-ci sont à fleur de pierre, disposition commune de par ailleurs en Inde, encore plus fréquente dans l’art égyptien, mais qui compte ici parmi les raretés. De la face Nord de cet édicule on a une vue étendue sur tout Genji et le pays qui l’entoure, l’horizon se borne par des collines. A cent mètres sous moi s’étalent les monumens comme sur un immense plan en relief. D’abord, la grande pagode de la première enceinte avec son haut gopura d’entrée qui s’ouvre à l’Est et que suivent un plus petit, puis trois autres s’orientant irrégulièrement Vers l’Ouest. Seul le dernier de ces portiques se trouve sur la même ligne que ceux du centre et de l’entrée. Les longues galeries couvertes règnent autour, avec les mandapams carrés. C’est la pagode aux mille colonnes dans son enceinte de briques, accompagnée de ses kiosques extérieurs, de même matière, à gopuras sculptés, massés par deux à l’Est, et par quatre à l’Ouest. Chacun de ces édicules dresse son toit pyramidal sur des colonnettes déliées, très hautes : autant de reposoirs où les brahmes asseyaient, les idoles pendant les fêtes.

Et c’est, avec la mosquée du Nord-Ouest, sommée de petits minarets en chandelier bulbeux, et où les musulmans célèbrent encore leur culte, le seul monument qui subsiste dans la première enceinte. Mais partout des ruines attestent l’ancienne splendeur de la forteresse sacrée aux trois collines. Elles jonchent le sol aride coupé par endroits de maigres champs de millet où poussent aussi quelques arbres, acacias, manguiers, tamariniers. Encore ceux-ci ne sont-ils guère tolérés parmi les cultures, tant leur ombre est vaste : Juniperi umbra gravis, nocent et frugibus umbræ.

Du Sud au Nord, la première enceinte dessine sa courbe irrégulière, avec, en son milieu, l’amas rocheux de la Batterie Royale où un pagotin délabré domine les gros bastions terrassés