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employées. Parfois, il est vrai, la fumée s’élève en larges bouffées des fentes du sol. Mais est-il un système de calorifère exempt de défauts ?

« L’ameublement sollicite à son tour votre regard. Toute la Corée couche sur des nattes. Les pauvres, — c’est-à-dire la grande majorité, — s’y allongent sans autres couvertures que leurs haillons habituels. Les possesseurs de quelques sapèques se passent la fantaisie d’une couverture qui, dans la classe aisée, vient s’ajouter à un petit matelas de dix à vingt centimètres d’épaisseur. Riches et pauvres cachent dans un coin de chambre un tronçon de bois quadrangulaire et épais de quelques pouces qui leur sert de traversin. Là finit, pour l’homme du peuple, la liste des meubles, à moins qu’on ne tienne compte du bâton transversal qui porte leur habit de rechange. Les gens plus à leur aise sont encore pourvus de quelques corbeilles qui pendent du plafond, ou que supportent des traverses de bois. Les lettrés et les marchands s’assoient auprès d’une petite caisse qui contient un encrier, un rouleau de papier, des pinceaux. Les jeunes dames renferment dans un coffre noir l’indispensable présent de noces : deux jupes, l’une rouge, l’autre bleue. Enfin, quelques livres chinois et des armoires vernies de dimensions modestes distinguent les maisons de la haute noblesse. »

À un pot de fleurs et à une cage d’oiseau près, je n’ai, en ce qui me concerne, rien découvert d’autre dans les différentes maisons coréennes de tout ordre qu’il m’a été donné de visiter.

Au long du chemin, toutes les localités ont été débaptisées, et c’est regrettable. Les Japonais n’ont pas permis au moindre des hameaux de conserver son nom. La capitale elle-même n’a pas été respectée. Séoul a cessé d’exister. Il m’est donc impossible, au passage des gares, de reconnaître si les villages environnans me sont connus ou inconnus. Le train roule toujours en pays de montagnes. Vers le Nord, au loin, je crois reconnaître la cime pointue du Puk-Han, le roi de tous les sommets coréens, sinon par l’altitude, du moins par les formes étranges qu’il assume. Soudainement dressé de la plaine qui court jusqu’aux portes de la capitale, une forteresse crénelée le couronne. Nul Coréen n’ignore son nom et ne manque, s’il en a le loisir, d’en gagner le faîte. La route grimpe au travers des bois de châtaigniers, au long des ruisseaux précipités en cascade. De vieux monumens se révèlent à peine sous la verdure qui les enfouit.