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fit lui-même les honneurs à ses visiteuses ; il n’avait rien trouvé de mieux pour amuser des étrangères n’ayant jamais vu Paris. Après les robes vinrent les pierreries, celles de Monsieur d’abord, qui s’étaient augmentées peu à peu de toutes les plus belles de Madame, qu’elle avait eu le bon sens de lui laisser prendre pour éviter les jalousies à propos de perles et de diamans. Il montra ensuite les joyaux qu’il donnait à la reine d’Espagne, et qui parurent peu de chose en comparaison des siens, puis il procéda à l’examen des pierreries que la duchesse Sophie avait apportées avec elle. Monsieur ne se souciait pas de produire à la Cour une tante à la mode d’Osnabruck, et il donna des instructions détaillées pour que toutes les pierres fussent remontées au goût du jour. Le reste de l’après-midi fut consacré à une longue consultation sur les toilettes qu’il fallait commander pour Fontainebleau, où le Roi invitait Mme d’Osnabruck au mariage par procuration de Mademoiselle. Le temps pressait ; la cérémonie était fixée au 31 août. En cinq jours, un « tailleur » parisien et « la bonne faiseuse de mouches » eurent transformé la duchesse Sophie et sa fille : elles se sentirent « faites comme les autres. »

Elles se mirent aussitôt en route avec leur suite : « Je me rendis avec ma fille le 30 d’août à Fontainebleau… Arrivant, je montai d’abord chez Madame, où je trouvai Monsieur et une fort grande foule de monde. Monsieur me fit d’abord entrer dans un petit cabinet pour me montrer son justaucorps, qu’il faisait broder avec (des) diamans pour les noces de Mademoiselle. Il me mena ensuite dans ma chambre… » Après un court repos, le marquis d’Effiat conduisit la duchesse dans le cabinet du Roi, où avait lieu la signature du contrat, et elle eut sa première impression, très impatiemment attendue, de la tant fameuse Cour de France : « Je vis Sa Majesté à l’entour d’une table avec la Reine et tous les princes et princesses du sang… La Grande Mademoiselle de Montpensier sortit de son rang, sitôt qu’elle m’aperçut, pour m’embrasser en me disant que j’étais sa parente, et puis se remit dans sa place. On lut cependant le contrat de mariage que le Roi et la Reine signèrent, ensuite tous les princes et princesses du sang, même les enfans de La Vallière et Montespan. Le duc de los Balbasos signa de la part du Roi d’Espagne, et tout cela se fit avec plusieurs révérences, ce qui était la beauté de la cérémonie. »

Au moment où la duchesse Sophie se préparait à sortir,