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La reine Victoria au roi des Belges.


Buckingham Palace, 11 juillet 1848.

… J’ai beaucoup à vous remercier pour votre chère et bonne lettre du 8. La prospérité de la chère petite Belgique est comme une brillante étoile dans la sombre tempête qui nous entoure. Puisse Dieu vous bénir et vous donner à tous le bonheur à jamais !

Depuis le 24 février, je sens une instabilité dans tout ce qui m’entoure, ce que je n’avais jamais senti auparavant, quelque fragiles que soient toutes les affaires humaines. Quand je pense à mes enfans, à leur éducation, à leur avenir et que je prie pour eux, — je me dis toujours : « Rendons-les capables de faire face à toute situation dans laquelle ils peuvent être placés, — en haut ou en bas. » Jamais auparavant ces pensées ne m’effleuraient, mais maintenant je les ai toujours. La façon de voir est absolument changée : — les tuiles[1], les contrariétés, dont nous nous serions plaints il y a quelques mois, apparaissent maintenant comme d’excellentes choses et une bénédiction, pourvu qu’on puisse maintenir en toute quiétude sa situation[2].

J’ai vu le Roi et la Reine samedi ; lui est encore étonnamment gai et tout à fait lui-même, mais elle est profondément atteinte par tout ce qui se passe, — et ici, on éprouve pour elle la plus grande sympathie et la plus grande admiration.


La reine Victoria au roi des Belges.


Buckingham Palace, 4 avril 1848.

Mon très cher oncle,

J’ai à vous remercier de vos trois aimables lettres des 18 et 25 mars et 1er courant. Dieu merci, je suis particulièrement solide et bien portante de toutes façons, ce qui est une bénédiction, par ces temps terribles, tristes et navrans. Dès le début,

  1. Bores. (N. d. t.)
  2. Ces lettres font ressortir avec un extraordinaire relief l’impression provoquée dans les cercles monarchiques par le courant révolutionnaire de 1848. (N. d. t.)