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faire plaisir. Nous sentons qu’ils sont là présens derrière leurs personnages et qu’ils leur souillent toute sorte de drôleries. Nous devinons chez eux, tandis qu’ils font manœuvrer tout ce petit monde si inconsistant, le demi-sourire du scepticisme bien parisien. Ils ne sont pas dupes et ils ne veulent pas nous prendre pour dupes. C’est un jeu ; et c’est cela qui amuse.

L’Amour veille a, été l’occasion pour Mlle Marie Leconte d’un des plus jolis succès de sa carrière. La fine et exquise comédienne a été cette fois la verve, le mouvement et le « diable au corps » lui-même. M. Berr est parfait d’ahurissement dans le rôle du jeune savant ; M. Grand, parfait de contentement de soi, dans le rôle d’André ; Mme Pierson parfaite de sagesse moqueuse ; Mlle Lara parfaite de résignation plaintive. On leur en voudrait presque de tant de perfection. Mlle Provost, une débutante, n’a pas encore le ton de la maison : elle le prendra bien vite.

L’éventail ne ferait que confirmer ce que nous avons dit à propos de l’Amour veille. C’est une comédie de même ordre et dont quelques parties sont même mieux venues. Le premier acte est fait avec rien, et très bien fait ; quelques scènes sont filées avec une adresse rare ; le type du bourru, Trévoux, est d’excellente caricature ; les aphorismes du vieux savant égrillard ont mis la salle en joie. Et j’estime que le cadre du Gymnase est très propre à faire valoir les ressources de cet art qui ne vise pas à la grande comédie. — Louons seulement M. Tarride pour son naturel, M. Dubosc, pour son comique pittoresque, Mlle Lender pour sa séduisante coquetterie, Mlle Blanche Toutain pour la justesse de son jeu.


C’est encore une comédie de genre que le Patachon de MM. Maurice Hennequin et F. Duquesnel. Elle appartient au cycle du « viveur. » Dans une comédie de genre, tout doit être conventionnel ; et la convention au théâtre veut que le vieux viveur soit un être délicieux. Il est éminemment le personnage sympathique. Il a pris la vie gaiement : c’est d’un bon exemple. Il a trop besoin d’indulgence pour n’être pas indulgent aux autres : cela nous met à l’aise. On ne se contente pas de l’apprécier pour la facilité de son humeur ; on lui prête de généreux sentimens, de la droiture, de l’élévation : il est le sage de la pièce. Tel Patachon.

Supposons un instant que nous ne soyons pas au théâtre : ce fêtard sur le retour nous paraîtrait tout bonnement hideux. Divorcé d’avec sa femme, la loi lui confie, pendant une partie de l’année, la garde