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durant la période « pré-cométale, » à une grève, à une discussion théologique suivie d’un vol, voire au début d’une guerre anglo-allemande, et nous montrant ensuite, durant l’autre période, une extraordinaire réunion des ministres anglais, où ces messieurs, — brusquement convertis au socialisme, grâce à la comète, — profitent de la présence accidentelle du jeune commis pour lui avouer leurs ambitions, leurs crimes, la folie scandaleuse de leur politique. Les faits ne manquent pas, à coup sûr, dans le récit nouveau ; mais l’auteur les raconte si précipitamment, avec un tel air de n’y attacher aucune importance, que nous les apercevons comme dans un brouillard, sans parvenir jamais à en être émus, ni à y prendre plaisir. Jusqu’au moment où se produit l’intervention de la comète, annoncée à tout propos dès le seuil du livre, nous attendons cette intervention et nous impatientons d’être tenus en suspens ; et lorsque enfin elle se produit, nous sommes étonnés de la pauvreté de ceux de ses résultats qui nous sont révélés. Le héros, s’éveillant d’un évanouissement provoqué par le choc, constate que toutes choses, autour de lui, sont maintenant plus belles et semblent plus vivantes ; puis il cause, fraternellement, avec un inconnu qu’il voit couché près de lui, et qui se trouve être le président du Conseil des ministres ; sur quoi viennent la séance ministérielle que j’ai dite, la réconciliation avec le ravisseur, la mort d’une vieille dame, et, pour finir, un tableau sommaire des améliorations introduites dans la vie publique et privée de l’humanité de demain. Et c’est sur ce tableau que se fonde M. Wells pour nous affirmer que, le jour où sera réalisé son idéal socialiste, les hommes ne connaîtront plus nul besoin de religion, nulle curiosité métaphysique, et goûteront une joie proprement céleste ! Sans compter qu’il néglige tout à fait de nous apprendre par quel moyen nous pourrons hâter la rencontre de notre globe avec cette comète, qui, dans son roman, nous apparaît comme l’unique et nécessaire condition de l’avènement parmi nous de son socialisme !


J’ai signalé ici, il y a deux ou trois ans, l’incroyable succès d’un roman de Mme Thurston, John Chilcote, membre du Parlement[1], où un député morphinomane se faisait remplacer, non

  1. Voyez la Revue du 15 novembre 1904.