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à lui dans une guerre contre l’Autriche, s’il était disposé ou entraîné à en recommencer une autre. Cette alternative se présente sans cesse à son esprit…


Lord John Russell à la reine Victoria[1].


Affaires étrangères, 1er décembre 1859.

Lord John Russell présente ses humbles devoirs à Votre Majesté. Il a écrit à lord Cowley, avec la gracieuse permission de Votre Majesté. Le fait de soutenir l’empereur des Français si l’Autriche tentait d’imposer par force à l’Italie un gouvernement contraire à la volonté du peuple, doit être jugé suivant les circonstances si elles se produisent. Lord John Russell n’est certainement pas disposé à affirmer qu’il ne saurait survenir de cas où la Grande-Bretagne serait obligée, dans son intérêt personnel, à aider matériellement l’empereur des Français. Mais il considère que cette éventualité est peu probable et que la crainte de cette alliance empêchera l’Autriche de troubler la paix de l’Europe.


La reine Victoria à lord John Russell.


Château de Windsor, 2 décembre 1859.

La Reine regrette extrêmement de voir par la lettre de lord John, datée d’hier, qu’il envisage la possibilité d’une entente avec la France pour entreprendre une nouvelle guerre en Italie ou de menacer l’Autriche d’hostilités. La Reine a mis cette hypothèse absolument hors de question. Si l’on permettait à l’empereur des Français de croire que cette éventualité n’a rien d’irréalisable, il pourrait soit la faire naître, soit acquérir le droit de se plaindre, si nous l’abandonnions. Ce serait exactement aussi dangereux et aussi déloyal envers l’Empereur de l’induire en erreur à ce sujet, que ce le serait pour la Reine de cacher à lord John que sous aucun prétexte elle ne renoncera à sa neutralité, dans le conflit italien, et n’infligera, à cause de cette querelle, à son pays et à l’Europe la calamité d’une guerre.

  1. Le 19 novembre fut signé le traité de Zurich, qui reproduisait les préliminaires de Villafranca, et on décida de réunir un Congrès pour régler les affaires italiennes.