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PASCAL A-T-IL ÉTÉ AMOUREUX ?

Á PROPOS D’UN NOUVEAU MANUSCRIT DU DISCOURS SUR LES PASSIONS DE L’AMOUR


Il n’y a guère qu’un demi-siècle qu’on se pose la question.

Je ne crois pas qu’avant la publication, par Victor Cousin, ici même, du Discours sur les passions de l’amour, on se soit jamais avisé sérieusement de croire ou de dire que Pascal ait été amoureux.

Mais depuis que Cousin, de sa voix grandiloquente, a proclamé l’auteur des Pensées « jeune, beau, plein de langueur et d’ardeur, impétueux et réfléchi, superbe et mélancolique, » depuis qu’il a vu « ses grands yeux lancer des flammes, » l’idée des amours de Pascal a fait du chemin dans les esprits, et elle a pour elle des autorités imposantes. Si quelques « pascalisans » y résistaient, ou y résistent encore, — Sainte-Beuve, Ferdinand Brunetière, M. Gazier, M. Michaut, M. Lanson peut-être, M. Brunschvicg, — d’autres l’acceptent et la défendent avec plus ou moins d’entrain : Faugère, Havet, Molinier, Ravaisson, le regretté Sully Prudhomme, M. Boutroux, pour ne pas citer les moindres. On sait que Mme  Ackermann a composé sur cette donnée un épisode d’un curieux petit poème. Tout récemment, M. Émile Faguet a consacré à Pascal amoureux un chapitre, — affirmatif, — du livre de fine psychologie, de verve ingénieuse, spirituelle