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pratiquée dans le corps de bâtiment, et l’on est introduit dans la cour intérieure. Cette seconde cour, carrée, est entourée de constructions. Dans l’angle des murs, à droite en entrant, un degré de pierre mène jusqu’au premier étage, à un palier extérieur sur lequel s’ouvrent deux portes, la première donnant accès dans les pièces aménagées sur la façade (par là on arrive à la chambre de Mandrin) ; l’autre s’ouvrant sur les chambres où logent le fermier et sa famille. Ce second appartement occupe le premier étage du bâtiment qui, en se repliant à angle d’équerre, ferme la cour sur la droite. Le degré de pierre s’abrite sous une toiture en auvent, couverte de tuiles. Sous le degré, au niveau du sol, l’entrée de la cave.

Par la voûte, on a pénétré dans la cour, et l’on voit, face à soi, le bâtiment qui sert d’habitation aux seigneurs du domaine : sept ou huit marches conduisent à une grande porte à deux battans, aux panneaux de noyer, encadrée de fins pilastres, que surmontent de petites urnes rondes, sculptées en haut relief dans la pierre. Chambranles et linteaux ont conservé leurs nervures du XVe siècle ; au-dessus, dans une niche, une Vierge en pierre sculptée, de la même époque, dont les pluies ont usé les contours. Les fenêtres à fins meneaux sont également du XVe siècle. Vers le milieu de la cour, à gauche, un puits rond, muni d’une pompe. Derrière le puits, un mur très bas qui rejoint le bâtiment du fond. Par la porte, qui y est percée, on accède au jardin en terrasse, d’où l’on domine la vallée du Palluel ; du jardin on arrive au potager.

L’ensemble des constructions, où des parties plus anciennes ont été conservées, date du milieu du XVIIe siècle.

C’est une motte fortifiée, ancienne résidence seigneuriale, militaire et agricole d’un baron laboureur, où, dans la vaste cour, en cas d’alarme sur la frontière, se réfugiaient les paysans. Et, de fait, défendue au Nord et à l’Est par le massif de la Chartreuse, elle offrait sur le Sud et sur l’Ouest un observatoire admirable pour surveiller l’ennemi.

De là, les Mandrins auraient pu voir les argoulets se rassembler sur les bords du Guiers, passer la rivière et monter jusqu’à eux par la vallée du Paluel, en se glissant parmi les blés. Mais ils dormaient sans méfiance, sur la foi des traités, confians en la sauvegarde que leur offrait la couronne de Sardaigne.