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Et, bien que l’air soit calme et sans brise, personne
Ne peut savoir pourquoi l’eau doucement frissonne,
Ni pourquoi le murmure harmonieux du flot
Semble parfois un rire et parfois un sanglot.
Ecoute !… et du jardin, du feuillage des arbres,
Et du chant des oiseaux, de la fraîcheur des marbres,
Des béryls, des onyx incrustés au pavé
S’élève jusqu’à toi leur immense Salve !
Viens, la table est dressée au bosquet des glycines,
Tu m’apprendras l’Hellas et ses cités divines,
Où les temps accomplis ont reçu du Passé
Un trésor de beauté d’âge en âge amassé.
Tu me diras les cieux éternels et les grèves
D’où se sont embarqués les Peuples vers les rêves,
Les pampres empourprés qui bordent le chemin,
Que les dieux ont peut-être effleurés de leur main,
Et l’auguste Soleil qui, sur la blonde plaine,
A, comme un fruit divin, mûri le corps d’Hélène !


AMICUS


Ami, qui dès l’enfance, en notre Pompéi
Fus mon cher compagnon, tu seras obéi ;
J’éveillerai pour toi dans l’ombre des enceintes
De l’éternel sommeil l’âme des choses saintes ;
Tes yeux verront le soir, sous les traits de Phœbos,
S’illuminer le golfe et la mer de Délos,
Tel, au premier contact des mains audacieuses,
Rougit le chaste sein des Vierges amoureuses.
De Chypre, où flotte encor l’esprit pur de Zénon,
Dans la haute Acropole, au seuil du Parthénon,
Sentant passer sur nous le souffle de la Grèce,
Nos âmes refléter son exquise tendresse,
Nous irons, à Pal las, au pied de ses murs blancs
Chanter l’hymne ravi de nos deux cœurs tremblans.
Mais ce soir, si tu veux, pardonne à ma folie,
Laisse-moi respirer encore l’Italie !…