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à elle le mouvement et le commerce. Il n’est pas surprenant que le sol y soit devenu rapidement cher, sans toutefois que les prix jusqu’ici atteints soient encore ceux qui ont été réalisés depuis fort longtemps dans la plupart des grandes villes moyennes de l’Europe. Nombre de parcelles non bâties n’ont été, il est vrai, payées qu’en partie, mais elles sont généralement aux mains de sociétés anonymes ou de riches capitalistes qui disposent des moyens de régler les échéances et d’entreprendre les constructions.

Reste à se demander si la crise continuera à paralyser le crédit, si même elle n’en privera pas complètement ceux qui y recourent par profession, au moment même où il leur serait le plus indispensable. Encore un peu de temps et, au début de l’automne, la campagne cotonnière va s’ouvrir. D’ici là, le planteur, le commissionnaire et le courtier se procureront-ils l’argent nécessaire pour en payer les frais ? La question se ramène à celle-ci : quelle est la situation ? quelles sont les dispositions des banques égyptiennes ? Son importance est capitale. La terrible crise qui faillit, en 1893, compromettre l’avenir de l’Australie, fut déterminée par la folle imprévoyance des banques locales qui, profitant de l’abondance des capitaux sans emploi accumulés en Europe par une longue période de stagnation industrielle, s’étaient fait remettre d’Angleterre et surtout d’Ecosse, en promettant de gros intérêts et en payant de grosses commissions, d’énormes dépôts à court terme. Elles les immobilisèrent eu prêts hypothécaires, en participations à des entreprises agricoles ou de construction, de façon à être incapables de les rembourser avant de longues années, dans le cas même où ces placemens auraient donné de bons résultats. C’est pourquoi, non moins de quatorze de ces établissemens furent emportés dont le passif n’était pas inférieur à 1 850 000 livres[1].

Telle n’est point la situation des banques qui fonctionnent en Égypte. En tête figure la National Bank dans les caisses de laquelle sont déposées les disponibilités du Trésor égyptien, celles du gouvernement soudanais et de la Caisse de la dette, ainsi que les fonds confiés à la garde des tribunaux mixtes, le tout formant, avec les dépôts ordinaires, un total qui, le 31 décembre 1906, n’était guère inférieur à 100 millions de francs. On a souvent reproché à cet établissement à caractère officiel, en possession

  1. A. Raffalovich, Journal des Économistes, juillet 1893. Cf. Pierre Leroy-Beaulieu, Revue du 15 sept. 1906. The Economist, 17 mars 1894.