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L’avenir semble encore plus brillant que le présent. La prochaine récolte de coton s’annonce exceptionnelle comme quantité et comme qualité. Celles qui la suivront seront normalement de plus en plus abondantes. Loin d’être achevée, la transformation du système des irrigations ne fait, en un certain sens, que commencer. 105 000 hectares viennent d’être aménagés en Haute-Egypte de façon à pouvoir être irrigués tout l’été et à supporter ainsi les cultures riches et intensives du cotonnier et de la canne à sucre. Le ministère des Travaux publics a décidé l’aménagement de 84 000 autres hectares suivant le même système. La surélévation de 7 mètres du grand réservoir d’Assouan qui contiendra ainsi 2 300 000 mètres cubes au lieu d’un million, la construction d’un autre barrage plus petit à Esneh et l’exécution de divers ouvrages d’art moins importans, permettront, non seulement de fertiliser d’immenses espaces stériles, mais de rendre beaucoup plus productif le territoire actuellement cultivé, grâce à une distribution plus abondante et plus régulière de l’eau du Nil[1]. Si l’on considère que ces grands travaux ont été accomplis ou vont l’être sans emprunt et sans augmenter les impôts que des dégrèvemens méthodiques ne cessent au contraire de restreindre ; si l’on tient compte de la force productive indéfinie de limon qui forme le sol de la Vallée du Nil, de l’activité infatigable et de l’énergie patiente de la race robuste et industrieuse qui peuple la Basse et la Haute-Égypte, on a de la peine à se défendre contre un excès d’optimisme.

À quoi se réduit donc la crise actuelle ? À peu de chose en somme. Des spéculateurs se sont chargés, au-delà de leurs forces, de titres qu’ils ne peuvent garder plus longtemps et dont ils cherchent à se défaire à n’importe quel prix. Leur affolement, causé en partie par un brusque retrait des crédits que les banques égyptiennes et étrangères avaient consentis jusque-là, trop largement peut-être, a réagi sur celles-ci. Elles refusent toute nouvelle avance, réclament des supplémens de couverture et n’acceptent plus que difficilement les effets de commerce qui leur sont offerts. De là une baisse énorme qui causerait beaucoup moins d’émoi si l’on se rendait compte de la sphère extrêmement exiguë dans laquelle elle s’exerce, et si l’on savait combien le montant nominal des titres actuellement en circulation est

  1. Voyez notre article sur les Irrigations en Égypte et les projets récens du gouvernement égyptien, dans la Revue du 1er septembre 1906.