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auxiliaire de cette pénétration ; le gouvernement, soucieux d’échapper aux difficultés parlementaires, demandait, sous le nom équivoque du Congo, des crédits destinés à des objets extrêmement peu congolais, et notre pauvre colonie de l’Afrique équatoriale, bornée à quelques factoreries côtières, à quelques postes dans l’intérieur, restait condamnée à ne pas vivre d’une vie propre. A force de la traverser, et sur les avis retentissans venus du Congo belge, on s’était aperçu pourtant qu’elle n’est pas dénuée de ressources en elle-même.

Le gouvernement, en 1898, n’était pas en position de tenter lui-même un effort de « mise en valeur : » il fut donc heureux d’en remettre la tâche aux Compagnies concessionnaires, et nous ne saurions le blâmer d’avoir fait confiance à des initiatives particulières, quoique l’expérience, insuffisamment préparée, n’ait pas immédiatement réussi : même un peu inconsidéré et précipité, ce mouvement valait mieux que la stagnation. Les Compagnies avaient reçu leurs concessions dans la zone équatoriale du Congo, celle du caoutchouc ; il fut reconnu bien vite qu’une dissociation s’imposait entre ces régions proprement congolaises et les « pays et protectorats du Tchad. » Ceux-ci donc, par un décret du 5 septembre 1900, furent érigés en un territoire militaire, doté d’un budget spécial : les dépenses de la conquête cessèrent de figurer sous la rubrique Congo, mais le siège de la colonie fut maintenu à Libreville, sur la côte. Pour gagner de là le moyen Congo, le commissaire général était contraint, faute de communications intérieures, à un long détour au Sud, par l’estuaire du fleuve, le chemin de fer belge et le Stanley Pool. Une organisation plus rationnelle est celle du décret du 29 décembre 1903, complété par celui du 11 février 1906. Le commissaire général réside à Brazzaville, sur le Pool ; il a sous ses ordres des lieutenans, seuls chargés de l’administration locale, pour le Gabon, région côtière ; pour le moyen Congo qui embrasse tous nos territoires intérieurs jusqu’au coude de l’Oubangui ; pour l’Oubangui-Chari, zone intermédiaire entre la forêt équatoriale et la steppe subsaharienne ; pour les « pays du Tchad, » qui constituent des « confins militaires. » Voilà enfin une division logique, calquée sur les diversités mêmes de la nature : l’administration congolaise est entrée, — c’est d’hier, — dans l’ère des réformes pratiques.