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Ne croyons pas, pourtant, que la chronophotographie date à peine de ces trente dernières années. Quiconque, à n’importe quelle époque, a comparé, au moyen d’images authentiques prises à des intervalles déterminés, le présent au passé, a fait, au fond, de la chronophotographie, sans le savoir ; en font, évidemment, l’ingénieur qui, à l’aide de photographies, surveille de loin l’avancement des travaux d’un chantier ; l’agronome qui, usant du même procédé, suit la culture de ses champs, etc. Mais, si on prend le mot de chronophotographie dans son acception la plus courante, en fait, c’est M. Janssen qui, le premier, en a nettement posé le principe lorsque, à l’aide de son revolver astronomique, il recueillait, en 1874, une série d’images de la planète Vénus passant sur le disque lumineux du Soleil. Le premier, d’ailleurs, l’illustre astronome prédit l’importance de cette méthode pour l’étude de toutes les questions de mécanique et, en particulier, de mécanique physiologique. Quelque temps après, un peu avant l’apparition des plaques au gélatino-bromure, M. Muybridge, à l’aide d’appareils à objectifs multiples, commençait la magnifique collection de photographies instantanées dont il a déjà été parlé dans la Revue (n° du 15 février 1893), collection où une foule d’animaux les plus divers étaient représentés aux allures les plus variées. Il employait, à ce moment, des plaques au collodion humide qui, sans atteindre la sensibilité de la gélatine bromurée, n’exigeaient cependant qu’une durée de pose très minime. En 1882, à son tour, M. Marey inventait, pour l’étude du vol des oiseaux, une sorte de fusil photographique, dans lequel il utilisait des plaques de verre gélatino-bromées ; malheureusement cet appareil, lourd et incommode, ne permettait pas d’obtenir plus de douze images à la seconde. Il est vrai qu’avec une seule plaque sensible maintenue parfaitement fixe, sur laquelle on fait agir la lumière à des intervalles convenables, on peut arriver, pour l’étude de certains phénomènes, à des résultats déjà très satisfaisans. Mais : 1° la confusion des images par superposition, confusion qui se produit dès que l’objet couvre une surface un peu étendue ; 2° la nécessité de placer cet objet, si ses mouvemens sont tant soit peu précipités, devant un fond parfaitement noir, et l’obligation qui résulte, dans ces conditions, de l’éclairer aussi bien que possible, imposent des limites assez étroites à l’emploi de cette méthode. Quelque parti qu’on en ait tiré, la chronophotographie sur plaque fixe ne peut