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lorsqu’elles s’exécutent, des délits caractérisés ? Nous avons déjà bien assez des grèves ouvrières ! Que deviendrions-nous si le procédé se généralisait, et si, à la moindre souffrance, au moindre mécontentement qui se manifesterait sur un point du pays, la grève des maires et celle des contribuables étaient proclamées ? Le régime de l’intimidation et de la force, remplacerait celui de la discussion libre et de la loi. Aussi longtemps que le Midi s’est livré à des manifestations bruyantes, mais légales, les sympathies ont pu se déterminer en sa faveur ; à partir du jour où il est entré dans les voies révolutionnaires, les sentimens qu’il excitait se sont un peu modifiés. On a continué de compatir à ses souffrances, sans trop se demander s’il n’avait pas lui-même contribué largement à les causer ; on y a cherché des remèdes ; on a, dans une pensée de solidarité, consenti à des sacrifices qui devaient peser sur le reste de la France ; on a senti toutefois qu’il y avait, même dans la générosité, des limites à ne pas dépasser, et que, pour conjurer un danger, il ne fallait pas en faire naître un autre.

L’attitude impassible du gouvernement et des Chambres n’a pas encore produit toutes les conséquences qu’on en pouvait attendre. Bien que des symptômes de lassitude aient commencé à s’y manifester, le Midi reste encore à l’état insurrectionnel. Une grande réunion a eu lieu à Montpellier le 7 juillet : la question y était de savoir si les maires et les municipalités qui avaient donné leur démission un mois auparavant devaient la renouveler ou la retirer, et il suffisait pour la retirer de ne pas la renouveler. On avait cru que l’esprit de conciliation et d’apaisement l’emporterait : il n’en a rien été, et la situation demeure incertaine. Une majorité considérable s’est prononcée pour le renouvellement des démissions : elle a été de 95 voix contre 11. Le département de l’Hérault restera donc quelque temps encore sur une espèce de Mont Aventin ; mais il y a lieu de remarquer que ce département compte 340 communes, et que 106 seulement étaient représentées à Montpellier. Deux causes immédiates ont peut-être empêché, ou retardé le mouvement de détente qui avait paru sur le point de se produire. A la veille de la réunion du 7 juillet, la Chambre a rejeté les deux premiers articles de la loi sur le mouillage, articles qui obligeaient les débitans à déclarer le degré alcoolique de leur vin et donnaient à l’administration des contributions indirectes des moyens de contrôler l’exactitude de leurs déclarations. L’autre incident qui a ému les esprits est que le juge d’instruction de Narbonne a procédé à un certain nombre d’arrestations, se rapportant à