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I

Dans ce nouveau continent enfiévré d’affaires, la plus grande « affaire, » c’est l’agriculture. C’est avec son agriculture que l’Amérique fait vivre son industrie. La ferme ne fournit pas seulement, comme partout ailleurs, — et beaucoup plus que partout ailleurs, pour les textiles par exemple, — une large part de matières premières ; elle fournit aussi à l’usine ses capitaux.

Par les exportations agricoles qui montent annuellement à 4 milliards de francs et dépassent de 1 500 millions les importations de même nature, les terres américaines mettent à la disposition des manufactures, des mines, des chemins de fer américains un excédent annuel qui permet à la nation d’emprunter à l’étranger un milliard et demi de francs et de payer sans s’appauvrir l’intérêt de ces capitaux d’emprunt. A mesure que l’industrie progresse, la part de l’agriculture, de 62 et demi pour 100 qu’elle était il y a cinq ans dans la masse des exportations, tend à diminuer par rapport aux produits ouvrés, bien que, considéré isolément, son chiffre augmente. Il est supérieur aujourd’hui de 660 millions à ce qu’il était de 1896 à 1900.

Payeur international, le fermier qui, depuis seize ans, a vendu au monde entier pour 62 milliards de francs de denrées et de marchandises, — soit cinq milliards de plus qu’il n’en faudrait pour acheter à leur valeur commerciale tous les chemins de fer des Etats-Unis, — le fermier américain a procuré au pays un profit net de 25 milliards de francs dans ses échanges au dehors. La richesse, exportée ou consommée sur place, que cet agriculteur, — c’est-à-dire 35 pour 100 de la population, — a créée depuis dix ans, égale la moitié de celle de la nation tout entière, représentant l’épargne et les efforts de trois siècles.

L’an dernier, les produits de la ferme, stupéfiant agrégat des travaux associés du cerveau, du muscle et de la machine, se sont élevés, sur le territoire de l’Union, à 32 milliards de francs. Ce chiffre, purement théorique d’ailleurs, puisqu’une partie des denrées qu’il représente se cumulent, — tels le bétail et le maïs employé à le nourrir, — nous sert à mesurer par comparaison le chemin parcouru. Nous constatons ainsi que le total de l’an dernier surpasse de 4 pour 100 celui de l’année précédente, de